Le Dodécanèse, archipel grec d'une douzaine d’îles au large de la Turquie, est occupé par les Italiens lors de de la guerre italo-turque de 1912 et rattaché au royaume d'Italie au traité de Lausanne en 1923. Il prend alors le nom d'Isole italiane dell'Egeo.
L'Italie débute l'année 1941 en pleins déboires avec la Grèce, son offensive sur l'Epire a échoué et les Grecs se sont permis de contre-attaquer, refluant l'armée italienne au-delà de la frontière albanaise. Quant à la flotte italienne, elle avait subit d'importantes pertes lors de l'attaque surprise sur Tarente dans la nuit du 11 au 12 novembre 1940 (opération Judgement).
L'amiral Andrew Cunningham, commandant la Mediterranean Fleet, envisage la conquête du Dodécanèse malgré la réprobation de Chuchill qui souhaite ménager la Turquie pour la faire basculer dans le camp allié sans créer des tensions avec la Grèce.
L’île de Castelrosso (Kastelorizo en grec) est choisie comme tête de pont pour une future conquête du Dodécanèse car située assez loin de Rhodes et Cunningham pense, à tort, que les Italiens ne sont pas capables d'entreprendre une riposte à l'invasion de l'île. Une petite garnison d'une cinquantaine d'hommes, composée de Carabinieri, Guardie di Finanza, soldats des transmissions et marins, veille sur la station TSF, le port et le palais de la délégation du gouvernement.
Destroyer Crispi
La prise de l'île.
Le 23 février 1941, 200 commandos du 50 Middle East Commando embarquent à la Sude en Crète à bord des destoyers HMS Hereward et HMS Decoy. escortés par le croiseur HMS Gloucester, navire-amiral aux ordres du contre-amiral Edward de Faye Renouf qui supervise l'opération. La flotte, guidée par le sous-marin HMS Parthian, est en vue de Castelrosso dans la nuit du 24 au 25 février et à 2h00 du matin, dix baleinières sont mises à la mer au large de la pointe Nifti. Deux embarcations réussissent à débarquer cinquante commandos mais les huit autres s'égarent dans le port. Repérées, elles sont la cibles de tirs provenant de l'île et sont contraintes de faire demi-tour. A 6h30, trois baleinières sont remises à l'eau pour apporter des renforts et une heure plus tard, tous les commandos réussissent à prendre pied sur l'île. La station-radio est occupée mais les Italiens ont le temps de détruire les codes et de se replier sur le Monte Viglia. Deux Italiens sont tués, un gravement blessé et douze sont faits prisonniers. Entre-temps, la canonnière Ladybird , provenant de Famagousta débarque à 6h15 une unité de 24 Royal Marines. Avec ses deux canons de 152, elle tire sur Paleocastro où la garnison italienne tentait une ultime résistance. A 10h00, les Italiens se rendaient, déplorant 6 morts, 7 blessés et 35 prisonniers.
HMS Decoy
La réaction italienne.
Vers 9h50, des chasseurs biplans Fiat CR-42 suivis par des bombardiers Savoia-Marchetti SM-82 apparaissent et attaquent les collines et s'en prennent à la Ladybird. Touchée à la proue, avec des blessés parmi son équipage, les Royal Marines rembarquent pour faire route sur Haifa. Pour les commandos, maîtres de l’île, le départ de la canonnière pose un problème pour ses transmissions, la Ladybird servant de navire-relais TSF avec la force navale de l'amiral Renouf.
Les commandos attendent la relève par les troupes qui doivent composer la nouvelle garnison : la compagnie B du 1er bataillon des Sherwood Forester. Cette force était partie de Chypre à bord du yacht armé HMS Rosaura le 24 février escortée par les croiseurs HMSA Perth et HMS Bonaventure. Les bombardements aériens reprennent le lendemain, moins intenses. L'état-major italien avait préparé la riposte : le 27 février au matin arrivaient au large des côtes les destroyers Francesco Crispi et Quintino Sella accompagnés des torpilleurs Lupo et Lince, des MAS 541 et 564 provenant de Rhodes. A bord des navires, une force de 250 soldats de l'infanterie de marine ainsi qu'un détachement de la 13eme compagnie CCNN est chargée de reprendre Castelrosso.
Les commandos qui ne possèdent qu'un armement léger et attendent la relève, sous le feu des canons des navires italiens doivent retraiter au sud-est de l'île. Le Hereward et le Decoy, incapables de s'opposer au débarquement italien reçoivent l'ordre de l'amiral Renouf de rejoindre Alexandrie ainsi que le Rosaura.
Le 27 février, les Sherwood Forrester sont transférés du Rosaura au Decoy et au destroyer HMS Hero.
Escortés par les croiseurs HMS Bonaventure et HMSA Perth et les destroyers HMS Hasty et Jaguar, la force navale commandée par le capitaine Egerton quitte Alexandrie pour Castelrosso, en vue le soir même, vers 23h00.
Pour les commandos, la situation est de plus en plus critique, à court de munitions, de vivres et d'eau. Une chaloupe est mise à la mer pour sécuriser le point de débarquement. Le major Cooper, commandant la compagnie de Sherwood Forresters part à l'encontre des survivants. Neuf commandos étaient déjà à bord du Decoy, dont leur chef, le colonel Symons. Sans appui aérien de la RAF, une nouvelle tentative de reprise de l'île s'avère trop dangereuse et il est décidé de rembarquer. Les Anglais déplorent 4 morts, 11 blessés et 40 disparus.
A 3h00, les navires repartent et arrivent à la Sude le 28 dans l'après-midi.
Source principale : War in the Aegean, the campain for the Middle Eastern Mediterranean in WW II. Peter C. Smith et Edwin R.Walker.