Le
25 juillet 1943, le roi Victor Emmanuel III nomme le maréchal
Badoglio chef du gouvernement avec les pleins pouvoirs militaires. Mussolini
apprend la décision lors d’une réunion avec le roi,
il est arrêté à l’issue de cette entrevue.
La fin de Mussolini se fit dans l’indifférence générale
même auprès des fascistes les plus durs. La majorité
des Italiens lassés de la guerre souhaitent sortir du conflit
par n’importe quel moyen, la confiance envers Mussolini et le
régime était en chute libre. Les Italiens étaient
convaincus que les puissances de l’Axe ne pourraient plus gagner
et que le territoire national serait bientôt envahit par les alliés.
Des grèves en mars 43 ouvrent une crise sociale qui montre l’assise
de la propagande anti-fasciste. Ces grèves n’ont rien changés,
au contraire la situation s’aggravait et la répression
se fit plus dure, pourtant il était clair que des grèves
pourraient éclater de nouveau dans les zones industrielles et
gagner les zones rurales.
La bourgeoisie industrielle prit peur de ces grèves, la menace
d’une reprise de la lutte des classes se faisait sentir. L’industrie
avait fait de gros profit en ces mois de guerre mais en raison de la
gravité de la situation économique l’argent ne rentrait
plus aussi facilement. Les capitaines d’industrie et de la finance
prennent leurs distances avec le régime et souhaitent une paix
séparée. Ceux qui mènent la Confindustria (l’équivalent
de notre medef) contribuent à créer une atmosphère
favorable à un coup d’état.
Déjà à la fin de 42, des groupes de dirigeants
politiques et militaires veulent l’élimination de Mussolini
au pouvoir, ils étaient convaincus que la guerre menée
au côté de l’Allemagne conduisait à la catastrophe.
L’armée bien que dispersé sur plusieurs fronts d’occupations
reste tout de même une force suffisante pour mettre en œuvre
un coup d’état et de faire face aux organisations paramilitaires
fascistes. La majorité de l’armée, sous influence
de la propagande fasciste, est restée fidèle au roi et
n’est plus confiante dans la guerre conduite par Mussolini. Notons
les responsabilités qu’ils eurent lors de la déclaration
de guerre en juin 40 et qu’ils n’ont émis que quelques
réserves lors de l’attaque de la Grèce et de la
Russie et ils se présenteront que comme des exécuteurs
techniques.
La situation la plus embarrassante est celle su roi qui avait favorisé
l’ascension des fascistes au pouvoir, il a partagé la décision
avec Mussolini d’attaquer la France, l’Albanie, la Grèce
et la Russie alors qu’il était pour la non intervention
pendant la période de non belligérance.
En
42-43, Badoglio fait les premiers pas vers les alliés pour obtenir
un appui en cas de coup d’état par l’intermédiaire
de deux membres de la maison royal, il rentre également en contact
avec le futur pape Paul VI. Le Vatican se rendait compte que le peuple
italien désirait la paix mais aussi que cette paix ne pourrait
être négocié par des hommes du régime comme
Ciano, plus préoccupés de sauver leur peau en abandonnant
Mussolini. Le consul italien à Genève chargé par
Aimone de Savoia, duc d’Aoste de rencontrer le vice consul britannique
à Genève Victor Farrel et propose la préparation
d’un coup d’état militaire pour renverser Mussolini
en échange d’un appui anglo-américain en faveur
du maintient de la monarchie. Le ministre des affaires étrangères
Eden accueille favorablement le projet, celui-ci veut faire sortir l’Italie
de la guerre pour signé une paix séparée et que
l’Allemagne occupe le pays et que les alliés y ouvrent
un front.
Pendant ce temps à Casablanca, Churchill et Roosevelt affirme
vouloir continuer la lutte jusqu’à la reddition sans condition
des forces de l’Axe. Pourtant Churchill avait pourtant toujours
déclaré que l’entrée en guerre de l’Italie
n’était du qu’à « un seul homme, un
homme seul », il pensait donc que l’Italie méritait
un traitement de faveur, soit une paix séparée faites
par un gouvernement où serait exclu Mussolini. Roosevelt se faisait
aussi la même idée ménageant ainsi les italo-américains
et des catholiques en vue des élections de 1944. Ike quant à
lui, désire chasser l’Axe de l’Afrique du nord et
occuper la Sicile qui assurerait la position alliée en Méditerranée
puis transférer le gros de ses troupes en Angleterre pour l’ouverture
du second. Ainsi, les décisions politiques et stratégiques
étaient prises sans que la question d’un débarquement
en Italie continentale soit envisagée. La formule de reddition
sans condition encourageait tout ceux qui en Italie espéraient
une paix séparée, ce qui est contradictoire dans un sens
puisque des conditions plus ou moins pesantes pourraient être
dictées par les vainqueurs. La décision prise à
Casablanca ne fermait pas au gouvernement italien la possibilité
d’établir des contacts en vue d’une négociation.
Du
côté de l’Axe, Mussolini demande à Hitler
des renforts allemands pour défendre la Tunisie et il affirme
qu’il ne pourra tenir en Afrique sans moyen et que les alliées
pourront agir à leur guise sur les rives de la Méditerranée.
Hitler lui fournira quelques renforts, insuffisant cependant pour tenir
la Tunisie.
Après
la reddition des troupes de l’Axe en Tunisie, l’opinion
estime que le roi détenait le pouvoir légal mais aussi
l’autorité morale pour révoquer Mussolini et sans
intervention allemande, les institutions crées par les fascistes
ne pourraient résister à un coup d’état.
Vers la fin du mois de juin, le roi semblait ne pas vouloir agir pour
le moment bien que les militaires fussent près à agir
rapidement. L’attente du roi s’explique par l’habitude
complaisante avec un régime autoritaire depuis 20 ans et il avait
peur des anti-fascistes, modérés comme révolutionnaires
; il craignait d’être perçu comme un complice du
fascisme, ainsi que responsable des défaites militaires. Il repoussa
donc la proposition de Bonomi, la formation d’un gouvernement
anti-fasciste. Le 24 juin, Mussolini prononça lors de la dernière
réunion du parti le discours passé à la postérité
sous le nom de « discorso del bagnasciuga », il y évoque
les activités anti-fascistes, la lutte contre le marché
noir, il juge les anglo-américains et leur conduite de la guerre.
Il reconnaît en fait le désastre dans lequel se trouve
l’Italie et admet qu’un débarquement local en Italie
n’est pas impossible. Il déclare ces fameuses phrases :
« le peuple italien est désormais convaincu que c’est
un question de vie ou de mort. Il faut qu’à peine ces gens
tenteront de débarquer, ils soient immobilisés sur la
ligne que mes marins appelle « bagnasciuga », la ligne de
sable… (Mussolini se rompe son « bagnasciuga » veut
dire ligne de flottaison ) Et si par aventure ils y pénètre,
il faut que les réserves se précipitent sur ces individus
et les anéantissent jusqu’au dernier homme. De façon
que l’on puisse dire qu’ils ont occupé un pan de
notre patrie, mais ils l’ont occupé en position horizontale,
non en position verticale ». Ces affirmations seront démenties
lors du débarquement de Sicile.
Les
principaux dirigeants fascistes De Bono, De Vecchi, Farinacci, Giurati,
Teruzzi, Bottai, Acerbo, Bastianini, De Cicco, Cianetti et Biggini obtiennent
le 16 juillet une réunion prévue le 24. Avant d’agir,
ils attendent l’entrevue de Feltre entre le Duce et Hitler, ils
espèrent que Mussolini fera part à Hitler que l’Italie
ne peut continuer la lutte, il n’en est rien, Hitler assure qu’il
enverra de nouveaux renforts et se plaint du manque de combativité
des Italiens. Pendant ce temps, Dino Grandi préparait l’ordre
du jour pour la réunion du 24 qui exigeait la fin des pouvoirs
de Mussolini ;
Le samedi 24 juillet à 17h15 débute la réunion
du grand conseil. Mussolini ouvre la séance en évoquant
la situation militaire et tire la conclusion qu’il faut poursuivre
la guerre, puis les ordres du jour sont présentés, celui
de Farinacci d’abord puis celui de Grandi qui est mis au voix
: 19 voix contre 7 et une abstention. Mussolini s’est montré
étrangement passif lors de la réunion, il n’avait
pas le choix, un coup de force de sa part contre les 19 dissidents aurait
déchaîné les réactions du roi et des militaires,
ce qui aurait été une humiliation aux yeux de Mussolini.
Il ne pouvait plus que se rendre chez le roi et lui demander de ne pas
prendre en compte le vote du grand conseil et choisir une solution de
compromis. Au matin du 25 juillet, Mussolini demande audience au roi
qui aura lieu à 17h. D’autre part, Badoglio reçu
dans la matinée sa nomination de chef du gouvernement.
Mussolini se rend donc à la Villa Savoia pour son entretien avec
le roi. L’entrevue fut brève, Victor Emmanuel annonce à
Mussolini qu’il sera remplacé par Badoglio et repousse
toute les protestations de Mussolini. A peine sorti de la villa, Mussolini
est arrêté par les carabiniers et n’oppose pas de
résistance.
A 22h45 la radio transmet le communiqué suivant : « sa
majesté le roi et empereur a accepté la démission
du chef du gouvernement, premier ministre, secrétaire d’état,
de son excellence le cavalier Benito Mussolini et a nommé chef
du gouvernement, premier ministre, secrétaire d’état,
le cavalier Maréchal d’Italie Pietro Badoglio ».
Il est annoncé ensuite que la guerre continue.
Après l’éviction de Mussolini, la radio annonçait
la nomination de Badoglio à la tête du gouvernement. Les
anti-fascistes laissent leur joie exploser, ils acclament le roi et
Badoglio mais ils demandent aussi la paix alors que le Maréchal
avait annoncé que la guerre continuait.
Les sièges locaux du parti fasciste furent dévastés,
les bustes de Mussolini et les symboles du régime jetés
en pâtures sur la voie publique, les fascistes et les miliciens
n’eurent aucunes réactions.
L’inaction des organisations fascistes lors du coup d’état
et des manifestations populaires démontre que le PNF (Partito
Nazionale Fascista : Parti National Fascite) avait cessé d’exister.
Le gouvernement Badoglio décida dès sa première
réunion de dissoudre le PNF ainsi que les organisations qui en
dépendaient. D’autre part, le nouveau gouvernement pris
peur des manifestations populaires, il craignait une insurrection qui
pourrait être dirigée par les communistes ou les républicains.
Des mesures répressives furent appliquées par l’armée,
83 civils sont tués, 208 blessés et 1 554 arrêtés
pendant les cinq premiers jours qui suivirent le 25 juillet.
Les partis anti-fascistes devinrent semi clandestins après le
25 juillet, continuant à recueillir des adhérents de toutes
les classes sociales mais ne furent pas légalisés, ils
ne pouvaient pas organiser de manifestations publiques, ni ouvrir de
siège, ni publier des journaux ou tracts. La presse anti-fasciste
continua donc son action clandestinement. D’autre part, pendant
la période des 45 jours les dirigeants du parti communiste comme
Lungo, Secchia et Scoccimarro, les socialistes Nenni, Pertini, Morandini
et Saragat et encore Bauer, La Malfa et Lusso pour le Partito d’Azione
rentrent de l’exil et commencent à former le futur CLN
(Comitato di Liberazione Nazionale, Comité de Libération
Nationale). Les divergences des partis firent leurs apparitions dès
le début surtout sur le sujet du changement d’alliance.
Une délégation comité composée de Bonomi,
De Gasperi, Salvatorelli, Ruini et Amendola rendit visite à Badoglio
dans le but de cesser les hostilités. Badoglio ne donna pas suite
à l’entrevue. Pendant ce temps, les alliés bombardaient
Naples, Turin, Milan, Gênes et Rome causant d’innombrables
destructions qui rendait la vie plus difficile à la population
civile déjà pessimiste en raison de la situation économique,
de l’afflux des renforts allemands et de l’attente des négociations
de paix espérées. A la moitié du mois d’août,
des grèves éclatent à Turin, Milan et dans les
autres grands centres industriels, le gouvernement craint une insurrection
mais les mouvements grévistes se calment. Il est clair que la
situation interne du pays est à la limite de la rupture et montre
que le nouveau gouvernement n’arrive pas à gérer
la situation.
Le
roi et Badoglio essayent de maintenir la monarchie au pouvoir craignant
une montée du communisme ou de tout mouvement s’appuyant
sur les mouvements ouvriers et les milieux populaires. Les collaborateurs
du nouveau gouvernement ont été fascisé soit par
conviction soit par intérêt et donc peu sensible aux exigences
démocratiques et à l’argumentation des anti-fascistes
et souhaitent maintenir un régime autoritaire le plus longtemps
possible. Pourtant le roi, lui aimerait abdiquer en faveur de son fils,
Badoglio est favorable à l’entrée des anti-fascistes
au gouvernement. Les buts fondamentaux du gouvernement Badoglio doivent
être pris en compte pour comprendre le processus de négociation
de l’armistice.
Badoglio avait annoncé que la guerre continuait car il avait
peur de la réaction allemande et des fascistes endurcis, il renvoyait
à plus tard la décision qui s’imposerait. Cette
décision était difficile à prendre. A la date du
25 juillet, les alliés contrôlaient les deux tiers de la
Sicile, avaient la maîtrise des mers et une nette supériorité
aérienne et personne ne savait ce qu’envisageraient les
alliés après l’occupation totale de l’île,
un débarquement en Italie continentale n’était pas
à exclure mais ce débarquement pouvait avoir lieu ailleurs
en Méditerranée. L’incertitude des intentions alliées
jouait en défaveur de Badoglio.
Les
Allemands disposaient au 25 juillet en Italie de 8 divisions incomplètes
dont 4 en Sicile, une en Sardaigne, deux en Italie méridionale
et une blindée près du lac de Bolzano. Le commandement
suprême allemand avait prévu une opération nommée
Alaric qui devait contrer une tentative alliée de débarquement,
dont l’un des premiers objectifs était d’occuper
l’Italie du nord pour en faire un bastion défensif de la
forteresse europe.
Par ailleurs, les forces italiennes présentes dans la péninsule
pouvaient empêcher la retraite des troupes allemandes en Sicile
si le gouvernement avait signé un arrêt des hostilités
avec les alliés mais ni le roi ni Badoglio n’ont envisagé
cette possibilité, ils ont préféré utiliser
les troupes pour réprimer les mouvement de foules. Ils ont aussi
été prudent avec les Allemands pour gagner du temps, ce
qui s’est révélé être une erreur, pour
négocier avec les alliés. On peut ajouter qu’il
aurait été difficile de s’opposer aux Allemands
avec une armée plutôt faible et endoctrinée par
une propagande anti-anglaise et philo allemande. Les Allemands pouvaient
faire défaire les 33 divisions italiennes présentent en
Yougoslavie, Albanie, Grèce et les 9 divisions en France, les
300 000 travailleurs Italiens en Allemagne ne pouvaient fuir. En somme,
l’occupation de l’Italie du nord par les troupes allemandes
ne pouvait être empêchée dès les premiers
jours qui suivirent le 25 juillet.
La
nouvelle de la réunion du Grand Conseil parvint à Berlin
entre le 25 et le 26, les informations étaient confuses, les
Allemands se rendirent compte de la situation dans la soirée
du 26, Hitler pestait contre la destitution de Mussolini et ordonna
que ses troupes arrêtent les « traîtres » (le
roi, Badoglio et les auteurs du coup d’état) et puissent
remettre Mussolini au pouvoir. Sur les conseils de Jodl, Hitler renonça
à passer à l’action pour maintenir des relations
avec le nouveau gouvernement pour gagner du temps et renforcer ses forces
en Italie.
A la demande de Badoglio, Hitler reçu l’attaché
militaire à Berlin, le général Marras mais refusa
de rencontrer le roi. En revanche il autorisa une rencontre entre Guariglia
et ambrosio et Keitel et Ribbentrop. Ce dernier était convaincu
à l’issu de la rencontre que les Italiens allaient passer
du côté des alliés.
Une autre entrevue eu lieu sur la demande des Allemands à Bologne
entre les généraux d’état-major Rossi et
Roatta et les Allemands Rommel et Jodl ; il y fut question de la défense
du territoire italien mais la méfiance était omniprésente
des deux côtés.
De ces rencontres militaires les Allemands ont réussi à
renforcer leur dispositif militaire en Italie sans rencontrer d’opposition
et les Italiens ont cru à tort avoir gagné du temps.
La
nouvelle du coup d’état parvint aussi à Churchill,
Roosevelt et Eisenhower, ils estimaient possible cette crise depuis
un moment. Suite à cette annonce, Ike fit préparer un
armistice entre ses troupes et celles italiennes.
Cette armistice imposait au gouvernement italien une cessation des hostilités,
la fin de l’entre aide avec les Allemands, le retour des prisonniers
de guerre alliés, le transfert de la flotte et de l’aviation
sous commandement alliés et la liberté d’usage du
territoire italien pour poursuivre le but de guerre anglo-américain.
Le document restera secret jusqu’à l’envoi d’un
émissaire italien.
Une conférence se déroula entre le 14 et le 24 août
au Québec, les chefs d’état-major Marshall, Brooke,
le ministre des affaires étrangères Eden et le secrétaire
d’état Hull sont présents pour cette conférence
où ils débattent de leur attitude qu’ils auront
envers l’Italie et sur la proposition d’un débarquement
en septembre en Italie proposé par Ike.
La
première tentative de contact avec les alliés fut accomplie
par Alberto Pirelli qui se rendit à Berne pour demander la médiation
du gouvernement suisse. La Suisse déclina l’offre car la
médiation dans un conflit armé n’entre pas dans
les prérogative d’un état neutre,et aussi ne souhaite
pas s’exposer à des représailles allemandes. Les
mêmes raisons écartent également le Vatican. Badoglio
et Guariglia décide donc d’utiliser un diplomate envoyé
à l’ambassade d’Italie au Portugal. Le marquis Blasco
Lanza d’Ajeta, ancien chef de cabinet de Ciano puis ambassadeur
auprès du Vatican fut choisi pour cette mission. Il rencontra
le 4 août l’ambassadeur britannique au Portugal Campbell,
Lanza d’Ajeta proposa de préparer un accord entre les alliés
et l’Italie, conseilla aux alliés d’alléger
la pression en Italie et de tenter un débarquement ailleurs en
Méditerranée, qu’une intensification des bombardements
pourrait déclencher une insurrection communiste et fit savoir
qu’une rencontre a eu lieu entre Guariglia et Ribbentrop. Le rapport
de Campbell fut envoyé à Churchill et Roosevelt qui émirent
des doutes sur la volonté italienne de se débarrasser
de son allié allemand.
L’échec de cette mission (ainsi qu’une autre prise
de contact de moindre importance) n’est pas du à l’émissaire
mais à la mission élaborée par Badoglio qui croit
obtenir une aide alliée avant même se rendre ou cesser
les hostilités. Le seul point positif de l’entrevue d’Ajeta
c’est la nouvelle du désir des alliés : ils veulent
prendre contact avec un général pour lui communiquer les
conditions d’armistice.
Badoglio accepta en partie la requête, il envoya à Lisbonne
un général pour discuter d’un débarquement
alliés mais pas des conditions d’armistice. Le général
Giovanni Castellano, homme de confiance de Ambrosio, fut choisi pour
accomplir cette mission. Accompagné d’un diplomate, Montanari,
il rencontre le 19 à l’ambassade britannique le général
américain Bedell Smith, chef d’état-major de Ike
et le général britannique Kenneth W.D. Strong ainsi que
les ambassadeurs Campbell et l’américain Kennan. Smith
commença par lire à Castellano le texte d’armistice,
ce dernier rétorqua qu’il n’est pas habilité
à traiter de l’armistice et soutien que Rome demande une
aide militaire qui sera suivie par la signature de l’armistice.
Smith déclare que les Italiens doivent dire s’ils acceptent
ou non les conditions, pas en discuter. Smith divulgue la signature
de l’accord entre Churchill et Roosevelt, accord qui entend aider
les Italiens dans la mesure où ceux-ci participent à la
lutte contre les nazis. Smith affirme que Ike communiquera l’entrée
en vigueur de l’armistice six heures avant le débarquement.
Castellano arrivera à Rome le 27 avec le texte d’armistice
et la déclaration de Québec, il est surprenant que le
gouvernement prenne connaissance aussi tardivement des conditions d’armistice
mais la prudence était la principale conseillère de Badoglio.
Rome décida d’envoyer une autre mission avant le retour
de Castellano. Le général Zanussi arriva à Lisbonne
le 25, l’envoi d’un deuxième émissaire suscita
des soupçons aux diplomates et militaires alliés, certains
pensèrent même qu’il s’agissait d’un
espion. Etrangement Eden envoya le texte d’armistice à
Campbell pour que ce dernier le consigne à Zanussi ce qui provoqua
la colère de Ike, il chargea Campbell d’amener Zanussi
à Alger. Le général italien y fut interrogé
pendant trois jours et prouva sa bonne foi.
Eisenhower préoccupé en raison de l’approche de
la date du débarquement demande au gouvernement de Rome quelle
est sa décision. Les Italiens sont perplexes, ce qui les embarrassent
c’est l’obligation de proclamer l’armistice quand
Ike le voudra et devront ordonner collaboration avec les forces alliées
et la résistance aux forces allemandes. Badoglio aurait souhaité
annoncer l’armistice après le débarquement et qui
à sa préférence devrait se dérouler au nord
de Rome. Badoglio et Guariglia décident que Castellano reprendra
les négociations avec une note qui stipule que le gouvernement
italien ne peut déclarer l’armistice si le débarquement
n’est pas effectué.
Castellano rencontra donc Bedell Smith le 31 août en Sicile à
Cassabile près de Syracuse. Pour hâter les discussions
les alliées prétendent vouloir parachuter une division
dans les alentour de Rome ce qui bien sûr intéresse les
Italiens mais ils surestiment aussi leurs propres troupes impliquées
dans l’opération Avalanche, les américains nommeront
les pourparlers « le grand bluff ».
Le lendemain, Castellano fait part de la réunion à Badoglio,
Guariglia, Acquarone et Carboni ; il est décidé d’accepter
l’armistice. Castellano fut envoyé à nouveau à
Cassabile, quand il dut signer l’armistice il déclara que
Rome ne l’a pas accrédité à signer le document.
Il est probable que se soit une négligence mais il ne faut pas
conclure à une dernière astuce. Un échange de messages
radio entre le commandement alliés et Rome permette de trouver
une solution.
Le 3 septembre à 17h à Cassabile, en présence de
Eisenhower, Smith et Castellano signe l’armistice.