1.Prélude
En
1874 Lord Carnavon, qui avait réussi à mettre en place
l’idée de fédération au Canada, pense qu’il
est possible de réitérer la chose en Afrique du Sud. Sir
Bartle Frere y est alors envoyé en tant que Haut Commissaire
pour assurer cette réalisation. Mais parmi les obstacles à
ce projet se trouvent 2 Etats indépendants : La South African
Republic ou Transvaal Republic et le royaume du Zululand.
Le
roi du Zululand était Cetshwayo, fils de Mpande, lui-même
demi-frère du célèbre Shaka, considéré
comme le père de la nation Zouloue. Ambitieux, il fit croître
son armée et adopta les méthodes de son oncle. Il commença
à équiper ses hommes de fusils. Il chassa les missionnaires
européens de ses terres et on suppose qu’il intrigua auprès
d’autres tribus locales pour les pousser à se rebeller
contre les Boers du Transvaal.
En
1877 Sir Theophilus Shepstone, considéré par Cetshwayo
comme un ami du fait de son soutien lors des innombrables querelles
frontalières avec le Transvaal, finit par annexer ce dernier
et par en devenir administrateur.
Frere
était persuadé qu’il devait réduire les Zoulous
pour accéder au rêve de dominion britannique sur l’Afrique
du Sud. En 1878, Il prétexta alors une violation de territoire
mineure (2 guerriers étaient partis récupérer 2
fuyardes originaires du Natal) pour demander 500 têtes de bétail
en réparation. Cetshwayo n’envoya que 50£ en or.
Plus tard, 2 ingénieurs furent capturés sur le territoire
Zoulou. Frere demanda de nouveau des réparations auxquelles Cetshwayo
opposa une fin de non recevoir.
Le
11 décembre 1878 Frere posa un ultimatum inacceptable à
Cetshwayo : la démobilisation de son armée avant le 31
du même mois. Pas de réponse de la part des Zoulous. Un
délai fut accordé jusqu’au 11 janvier, toujours
sans réponse.
L’Angleterre se considéra alors comme en guerre contre
les Zoulous.
2.
Le plan d’invasion britannique
Quand
il apparut que la guerre était à peu près inévitable,
un plan d’invasion du Zululand fut mis en place. Le but principal
était l’occupation du kraal (camp) royal à Ulundi
par 3 axes d’approche, soit une tactique similaire à celle
utilisée par les Zoulous.
La
colonne 1 du colonel C.K. Pearson devait traverser le fleuve Tugela
et avancer vers Ulundi via Eshowe. La force d’attaque principale,
la colonne 3 devait partir de Pietermaritzburg, pénétrer
en Zululand à Rorke’s drift et de là continuer vers
l’est en direction du kraal royal. Sur la gauche la colonne 4
du colonel H. Evelyn Wood devait se concentrer à Utrecht en vue
d’une attaque d’Ulundi par le nord-ouest. Deux colonnes
additionnelles de moindre importance devaient garder les frontières
: La colonne 2 du colonel A.W. Durnford devait empêcher les Zoulous
de franchir le Tugela et la colonne 5 devait stationner à Luneberg
pour protéger le Transvaal.
La
colonne 3 était sous le commandement du col. R.T. Glyn, accompagné
du lieutnant-general Lord Chelmsford. L’état-major au complet
représentait 20 hommes. Elle était composée comme
suit :
Infanterie
- 1st battalion du 24th Foot : Ltc H.B. Pulleine
- 2nd battalion du 24th Foot : Ltc H.J. Degacher
- 5th Company Royal Engineers : Cpt W.P. Jones, détaché
de la colonne avant d’entrer au Zululand
Pour un total de 1275 hommes
- - Battery « N » de la 5th Brigade Royal Artillery : Ltc
A. Harness (132 hommes, 6 pièces de 7 pdr, 2 lance-fusées)
Troupes montées
- N°1 squadron Mounted Infantry : Ltc J.C. Russel
- Natal Mounted Police : Major J.G. Dartnell
- Natal Carbineers : Cpt T. Shepstone
- Newcastle Mounted Rifles : Cpt R. Bradstreet
- Buffalo Border Guard : Cpt Smith
Pour un total de 320 hommes
Troupes additionnelles indigènes
- 3rd Regiment Natal Native Contingent : Cdt R. de la T. Lonsdale
o - 1st battalion : Cdt G. Hamilton Browne
o - 2nd battalion : Cdt A.W. Cooper
o - N°1 Company Natal Native Pionner Corps : Cpt J. Nolan
Pour un total de 2 566 hommes
Le
Train de combat était composé de 302 chariots de toute
sorte, 1507 boeufs, 49 chevaux (hors troupes montées) et 67 mules
encadrés par 346 conducteurs. Soit 4313 combattants potentiels
sur un effectif total de 4659 hommes et officiers.
Il est évident qu’un tel équipage ne pouvait se
déplacer que lentement...
Le
9 janvier la colonne était concentrée à Rorke’s
drift où elle laissa une petite garnison commandée par
le major H. Spalding au poste fortifié d’Helpmekaar. Le
10, l’ordre de traverser la rivière et de commencer l’invasion
du Zululand fut donné pour le lendemain.
3.
L’invasion commence
A
4h30, le Natal Native en tête, la colonne traverse le gué,
protégée par l’artillerie installé sur une
butte adjacente et une section de reconnaissance montée en tête
de pont. A 6h30 toutes les troupes avaient franchi la frontière.
La journée fut passée à installer un campement
et à faire traverser le train des équipages.
Du
fait de l’obstacle que représentaient les vastes fonds
sablonneux de la Batshe ainsi que les crêtes rocailleuses au delà,
une piste devait être aménagée avant de poursuivre
toute avance. Mais le kraal de Sihayo, situé dans la vallée
de la Batshe menaçait le flanc gauche des Britanniques. Bien
que Sihayo et son fils Mehlokazulu se trouvaient à Ulundi, leur
comportement passé était une des causes de la guerre désormais
en cours et lord Chelmsford décida d’attaquer son campement.
Au matin du 12 janvier la force d’assaut , constituée d’un
peloton de reconnaissance de cavalerie, du Natal Native et du 1/24th
Foot se mit en route en direction d’une gorge rocheuse où
s’étaient retranchés les hommes les hommes de Sihayo
avec leur bétail. Les hommes du Natal Native ne semblèrent
que peu motivés à attaquer les Zoulous, certains d’entre
eux étant armés de fusils. Les baïonnettes du 1/24th
Foot les empêchèrent de retraiter. Après un bref
engagement les Zoulous battirent en retraitent, ayant perdu 30 morts,
4 blessés et 10 prisonniers. De son côté le Natal
Native avait perdu 2 tués et 12 blessés dont 1 officier
et 2 sous-officiers. Les blessés furent ramenés à
Rorke’s Drift avec 2 Zoulous dans un état grave.
Deux
jours plus tard, 4 compagnies du 2/24th, le 1/3rd Natal Native et les
Pioneers s’engagèrent dans la vallée de la Batshe
afin de préparer une route acceptable pour la poursuite de l’avancée
des troupes. Le 15 janvier le ltc Russel partit en reconnaissance jusqu’à
Ispezi Hill-soit près de 30km à l’intérieur
du territoire ennemi-tandis que le 17 Lord Chelmsford chevauchait jusqu’à
Isandlwana qu’il avait sélectionné comme lieu du
prochain bivouac.
Lord
Chelmsford a souvent été critiqué pour le choix
de cet emplacement mais il convient de noter qu’il s’agit
du seul endroit dans les environs immédiats offrant un espace
de campement suffisant, tout en offrant suffisamment de bois et de broussailles
pour les feux ainsi que de l’approvisionnement en eau. L’espace
offre de larges champs de tirs à l’est et au sud sur plus
de 2km et les fortes pentes d’Isandlwana même protègent
les arrières. Bien qu’il soit surplombé par plusieurs
collines au nord, celles-ci sont relativement lointaines et cet inconvénient
n’était pas significatif au regard de l’armement
de l’époque.
C’est
donc à cet endroit que les troupes s’installèrent
dans la journée du 20 janvier. Le camp faisait face à
l’est, vers la large vallée de la rivière Nxobongo
Il est important de remarquer que même du sommet d’Isandlwana,
il n’est pas possible de voir la vallée de la Ngwebeni
et le plateau de Nqutu. Ces derniers se trouvent en effet dissimulés
des regards des sentinelles par un autre bas plateau situé au
nord du campement, d’ailleurs souvent confondu avec le plateau
de Nqutu. Même sur ce bas plateau la vue est insatisfaisante.
Pour
protéger le camp, étendu sur environ 800m, des vedettes
montées furent postées à 3 endroits sur le plateau
du nord, sur le « conical kop », éminence située
à l’est et sur une petite colline au sud-est, tandis que
des piquets d’infanterie étaient disposés à
environ 1500m de front et sur les flancs. Chaque bataillon mit une compagnie
à disposition pour ce faire. La nuit les vedettes furent retirées
et les avant-postes reformés pour former un cercle à 500m
du camp. Le Natal Native organisa un avant-poste détaché
à 1000m au nord, où un sentier descendait du plateau.
Le 24th Foot organisa quant à lui une garde permanente sur le
col qui séparait Isandlwana d’une petite éminence
au sud. Chelmsford avait donné des consignes de formation d’un
« laager » (cercle de chariots) et de creusement de tranchées.
Aucun laager ne fut cependant mis en place, sachant qu’une partie
des chariots avaient été requis dans la journée
pour transporté du matériel de Rorke’s Drift et
que de toute façon le nombre total de chariots disponibles était
inférieur à celui requis pour la constitution d’un
laager de cette taille. De plus le campement n’était que
provisoire et la difficulté de mettre en place puis de briser
le laager semblait disproportionnée. Quant aux tranchées,
le manque d’outils et la dureté du sol expliquent qu’aucune
n’ait été creusée. Il eut été
possible d’installer un système de parapets, mais sa mise
en place eût nécessité plusieurs jours. En fait,
il semblait évident qu’une force britannique, armée
de fusils Martin-Henry et soutenue par l’artillerie, n’avait
qu’à se regrouper pour affronter et repousser un assaut
de Zoulous armés principalement de sagaies.
Chelmsford
arriva au campement en milieu d’après-midi et repartit
presque aussitôt pour reconnaître le repaire de Matyana
qui était supposé se trouver dans la vallée de
Mangeni, à une quinzaine de km au sud-est. Sur place, il ne repéra
aucune force armée mais put distinguer quelques huttes et des
femmes au fond d’une ravine. Cependant, à son retour au
camp vers 18h30 il lui fut reporté que de nombreux Zoulous avaient
été repérés dans les vallées environnant
les kraals de Matanya. Chelmsford ordonna donc 2 reconnaissances dans
cette direction pour le lendemain, aux ordres du cdt Lonsdale et du
major Dartnell.
4.
Avance et disposition des forces zouloues
Cetshwayo
possédait un système de renseignement très bien
développé et il est certain qu’il avait une idée
assez précise des positions des différentes colonnes britanniques.
Les colonnes du centre et de la côte représentait la menace
la plus importante et il est important de noter que les Zoulous eurent
2 assauts majeurs à réaliser le même jour: Inyezane,
près d’Eshowe, et Isandlwana.
Les éléments composant la force qui devait s’opposer
à la colonne du centre se concentrèrent dans les plaines
d’Ulundi le 17 janvier et dirigée vers le kraal militaire
de Nodwengu pour recevoir les instructions du roi. L’armée
zouloue devait progresser lentement pour conserver ses forces et attaquer
de jour, probablement du fait des difficultés de communication
de nuit. Les guerriers reçurent pour consigne de ne pas franchir
la frontière du Natal et de tuer les soldats reconnaissables
à leurs tuniques rouges.
On
estime l’armée zouloue à environ 22000 hommes. Le
commandant en était Mnyamana, âgé de 60 ans, mais
il n’en avait pas le contrôle tactique entier. Les Britanniques
attribuent ce rôle à Tshingwayo, son aîné
de 10 ans, mais il semble qu’il partageait cette responsabilité
avec Mavumengwana. Dubulamanzi, le frère aîné du
roi, aurait lui aussi joué un rôle important en la matière.
L’armée quitta Nodwengu en fin de journée le 17
et n’alla pas plus loin ce jour là que les rives de la
White Umfolozi. Les 2 jours suivants elle accomplit des progressions
similairement courtes d’une quinzaine de km, l’amenant près
des sources de l’Umhlatuzi. Les Zoulous avaient désormais
le choix entre se diriger vers le sud puis vers l’est vers la
région contrôlée par le chef Matanya ou plein ouest
vers le plateau situé au nord d’Isandlwana. C’est
cette option qui fut retenue. Si les hommes avaient pu être ravitaillés
convenablement jusqu’au 20, à partir du 21 les hommes n’avaient
plus rien à manger et des groupes quittèrent la vallée
pour se mettre en quête de nourriture. Il semble évident
que ce sont ces groupes qui alarmèrent les vedettes montées
et poussèrent le lieutenant Raw à découvrir le
bivouac zoulou.
Annexe
: L’armée zouloue était divisée en régiments
ou « impis », par classe d’âge.
L’attaque zouloue typique est appelée « izimpondo
zankomo » ('Cornes du buffle), soit un double mouvement d’encerclement
figurant les cornes de l’animal. Quatre groupements participent
à l’attaque : la corne droite, la corne gauche, la poitrine
(assaut frontal) et les côtes (réserve).
L’armement de base était la sagaie ou « assegai »
et le bouclier, très grand, destiné à se protéger
et pouvant se transformer en arme d’assaut contre des opposants
armés de manière similaire.
5.
Reconnaissance en force des Britanniques
Conformément
aux ordres de Chelmsford, Lonsdale quitta le camp à 4h30 le 21
janvier pour se diriger vers le sud, ne laissant sur place que 2 compagnies
du 3rd Natal Native. Lonsdale devait retrouver Dartnell à Mangeni
plus tard dans la journée. Dartnell quitta quant à lui
le camp 1 heure plus tard avec 150 hommes prélevés sur
la Natal Mounted Police, les Natal Carbineers, les Newcastle Mounted
Rifles et la Buffalo Border Guard. La colonne traversa la plaine jusqu’aux
pentes du Hlazakazi où elle se divisa en 2. Les Carbineers grimpèrent
la pente tandis que Dartnell et 40 hommes traversaient la Mangeni. A
environ 1.5km en face d’eux ils virent plusieurs centaines de
Zoulous marchant en direction du nord, vers les pentes du Magogo. Dartnell
se replia sur le Hlazaki où il retrouva les Carbineers.
Le
Natal Native escalada le Malakatha en passant par la vallée de
la nDewi mais ne repéra aucun signe d’activité ennemie
si ce n’est un troupeau de bétail errant ramené
à Isandlwana par 2 compagnies. Puis la colonne se dirigea vers
les positions de Dartnell où elles montèrent un bivouac.
Le major Gosset et quelques officiers s’en retournèrent
à Isandlwana avec la demande de Dartnell pour des couvertures,
des rations et l’autorisation d’attaquer le lendemain.
Au
coucher du soleil, Dartnell estimait à 1500 les Zoulous regroupés
sur les pentes du Magogo. Il y envoya une patrouille qui faillit être
encerclée et dut battre en retraite. Dartnell envoya un message
demandant des renforts en prévision de l’attaque du lendemain.
Les couvertures et les rations arrivèrent tardivement mais en
quantité insuffisantes. Ce sont les hommes du Natal Native qui
souffrirent de cette pénurie de rations. La nuit fut froide et
de fausses alertes semèrent la panique parmi les chevaux du contingent.
A l’aube le moral des hommes était plutôt bas.
A
8h30 le lieutenant E.S Browne et une petite section de troupes montées
furent envoyées depuis Isandlwana pour reconnaître les
environs de la colline de Isiphezi, plus loin à l’est,
derrière laquelle se poursuivait la piste menant à Ulundi.
Plusieurs groupes importants de Zoulous furent repérés
et il y eut même quelques échanges de coups de feu mais
aucun signe du principal corps d’armée ne fut signalé.
Ce fait est étonnant car les hommes de Browne devaient en être
tout près et l’on ne peut que supposer que ce dernier s’est
limité à explorer les pentes sud-ouest de la colline.
Les Britanniques retournèrent au campement dans l’après-midi.
Chelmsford
avait passé la matinée à visiter le frère
de Sihayo, Gamdana, qui vivait au pied du Malakatha et qui, après
l’attaque des kraals de son frère, avait envoyé
plusieurs messages reconnaissant sa soumission à l’autorité
britannique. Plus tard, Chelmsford alla visiter les avant-postes montés
du plateau nord. De là, 14 Zoulous furent repérés
à 1.5km au nord-est avant de disparaître. Chelmsford retourna
au campement.
6.
Lord Chelmsford divise ses forces
Lorsque
Chelmsford reçut le dernier rapport de Dartnell à 1h30
le 22 janvier Chelmsford donna comme ordre qu’à peu près
la moitié des troupes disponibles le rejoignent en renfort. Nul
ne sait pourquoi Chelmsford donna cet ordre mais il convient de noter
que 30 ans plus tôt les Zoulous, lorsqu’ils attaquaient
les Voortrekkers (terme désignant les Boers ayant participé
au grand Trek-ou grande migration-entre 1835 et 1852), utilisaient couramment
une route qui passait à 10km à peine à l’est
des positions de Dartnell, dans le secteur tenu par Matanya. Chelmsford
a ainsi pu supposer que la force d’attaque principale des Zoulous
se trouvait dans ce secteur. Avant de quitter le camp avec cette troupe
Chelmsford envoya un message au colonel Durnford, alors à Rorke’s
drift, de se diriger vers Isandlwana avec tous les hommes de la colonne
N°2 disponibles.
A
3h30 les hommes se mirent en route, chacun portant une ration d’une
journée et 70 cartouches. Chelmsford et son état-major
chevauchaient en tête. Le colonel Glyn commandait la troupe, constituée
de 4 canons de la Royal Artillery (ltc Harness, 60 hommes), six compagnies
et la fanfare du 2/24th Foot (500 hommes), 122 hommes à cheval,
16 compagnies du Natal Native (1660 hommes) et 90 hommes du Natal Native
Pioneer, soit environ 2500 soldats et officiers.
Chelmsford
arriva au bivouac de Dartnell vers 6h00, heure à laquelle les
Zoulous avaient quitté le Magogo. Les troupes montées
furent envoyées en un mouvement tournant vers le sud pendant
que le Natal Native partait tout droit en direction de la pente nord-ouest.
Au lever du soleil quelques Zoulous apparurent sur la crête mais
s’enfuirent avant que les Natives puissent les rejoindre. Alors
qu’ils traversaient la Nondweni pour gagner les hauteurs du mont
Phingo Dartnell les attaqua par le sud, en tuant une trentaine. Les
Natives chargèrent à leur tour et en tuèrent quant
à eux une cinquantaine.
A
9h30 Chelmsford prit son petit déjeuner entre les monts Silutshana
et Magogo, le camp principal d’Isandlwana se trouvant à
cet endroit caché par le premier. Apprenant que des Zoulous avaient
été repérés avaient été repérés
au nord-est d’Isandlwana, il envoya le lieutenant B. Milne sur
une colline avec une meilleure vue. Milne ne repéra pas d’ennemis
mais signala par sémaphore que le bétail avait été
regroupé près des tentes. Au bout d’1h30 il revint
vers Chelmsford qui avait entre-temps renvoyé le commandant Hamilton-Browne
et son bataillon vers le camp de base via la vallée de la Nxobongo,
nettoyant le terrain à mesure de sa progression. Au même
moment Harness était envoyé à Mangeni. Le ltc Russel
quant à lui partit reconnaître la vallée de la Nondweni
et les pentes de l’Ispezi avant de repartir en direction d’Isandlwana
par la piste. Le restant des troupes se dirigèrent vers Mangeni
où le nouveau bivouac devait être installé. Peu
après Chelmsford reçut un message de Pulleine qui disait
« Les Zoulous approchent en force sur le flanc gauche du camp.
8h05 ». Estimant le noyau de l’armée ennemie plus
proche de lui que d’Isandlwana et confiant dans la supériorité
de l’armée britannique, il ne s’alarma pas.
Vers
midi Harness franchit le col séparant le Magogo et le Hlazakazi.
Peu de temps après des coups de feu furent entendus en provenance
d’Isandlwana. Puis, un message lui parvint de du cdt Browne qui
disait « Pour l’amour de Dieu venez avec tous vos hommes
; le camp est encerclé ne tiendra pas sans renforts ».
Le major Gosset fut chargé de prévenir Chelmsford pendant
qu’Harness se mettait immédiatement en route. Chelmsford
avait lui aussi reçut l’information et galopa sur les pentes
du Mdutshana d’où l’on pouvait voir le campement.
Ne voyant rien d’anormal il ne tint pas comptes des 2 rapports
et ordonna à Harness de faire demi-tour. Une des procédures
standard en cas d’attaque dans l’armée britannique
était de détendre les cordes tenant les tentes de manière
à ce que les hommes ne se prennent pas les pieds dedans. Ce ne
fut pas fait, pouvant donner que rien ne se passait. Les coups de feu
au loin purent quant à eux être interprétés
comme des tirs d’entraînement.
A
14h00 Chelmsford se mit tout de même en route en direction d’Isandlwana
et rencontra rapidement le ltc Russell qui avait lui aussi reçut
des nouvelles de l’attaque et s’était mis en quête
de le rejoindre. A 14h30 ils croisèrent le 1/3 Natal Native.
A 10h00 ces derniers avaient capturé un éclaireur zoulou
qui affirma qu’une attaque du camp de base était imminente.
au campement. Après avoir progressé de 5km, les signes
d’une attaque étaient devenus incontestables. Browne avait
alors envoyé un message (celui reçu par Harness) et décidé
de se porter en renfort au campement mais, apercevant les milliers de
Zoulous à l’assaut du camp les Natives refusèrent
d’avancer. Lorsque Chelmsford arriva il apprit que le camp avait
été débordé mais refusa tout simplement
de le croire. Peu de temps après Chelmsford rencontra le cdt
Lonsdale qui était retourné au campement dans la matinée
et s’était approché suffisamment près pour
pouvoir confirmer la terrible nouvelle. Un message fut immédiatement
envoyé à Glyn de se rendre à Isandlwana sans délai.
7.
La bataille d’Isandlwana
Lorsque
Lord Chelmsford quitta le camp aux petites heures du 22 janvier il laissa
le ltc Pulleine en charge de son état-major (2 officiers, 1 interprète,
13 hommes), 2 canons de la Royal Artillery (2 officiers, 70 hommes),
3 Royal Engineers, le PC et 5 compagnies du 1/24th Foot (13 officiers,
402 hommes), une compagnie du 2/24th Foot (5 officiers, 170 hommes),
6 hommes du 90th Foot, 5 officiers et 110 hommes des troupes montées,
le Army Service and Hopital Corps (1 officier, 18 hommes), le reliquat
du Natal Native Corps (19 officiers, 1 interprète et environ
400 hommes) et le Pioneer Corps (1 officier et 10 hommes). Pulleine
avait donc sous son commandement approximativement 750 combattants blancs
et 420 indigènes, soit 1170 hommes.
Après
le départ de Chelmsford, le camp mit en place la routine habituelle.
Les vedettes montées chevauchèrent vers leurs postes,
les piquets de nuit furent relevés et les travaux d’aménagement
de la piste continuèrent. Des coups de feu furent entendus loin
à l’est et à 8h00, pendant que la plupart des hommes
déjeunaient, une vedette vint prévenir de la présence
d’une large force zouloue approchant par le nord-est sur le plateau
du Nqutu. Les troupes furent mises en état d’alerte et
rassemblées devant les tentes, l’infanterie en colonnes
de compagnies face à l’ennemi. Les avant-postes furent
rappelés mais les hommes du Natal Native en position au nord
et à l’arrière du « conical kop » restèrent
en position. Pulleine envoya un messager auprès de Chelmsford.
En 10mn les hommes furent en position, à environ 800m des tentes,
de larges trous marquant l’absence des troupes parties le matin
même. De nombreuses silhouettes zouloues apparurent à l’horizon
à environ 3km au nord-est et les vedettes signalèrent
de larges groupes ennemis sur les hauteurs. A titre de précaution
Pulleine fit rassembler les bœufs des attelages et rappeler les
hommes au travail sur la piste. Rien de plus ne se passa pendant environ
une heure. Puis quelques Zoulous apparurent à environ 3km à
l’est des hommes du Natal Native en position sur le plateau de
Nqutu avant de disparaître. Peu après un messager en provenance
du plateau fit savoir que 3 colonnes ennemies avaient été
repérées, 2 se retirant vers le nord-est, l’autre
marchant cependant vers l’ouest.
Conformément
aux ordres de Chelmsford, Durnford se mit en route vers Isandlawana
depuis Rorke’s drift, amenant avec lui son état-major,
3 lance-fusées (maj. F.B. Russell + 9 hommes), 5 escadrons du
Natal Native Horse (cpt W. Barton + 259 hommes) et le 1/1 Natal Native
(240 hommes). En tant que plus ancien dans la fonction, le commandement
échut à Durnford mais il n’y eut pas de conflit
entre lui et Pulleine quant à la disposition des troupes. Apprenant
la présence d’ennemis sur le flanc gauche, Durnford décida
de s’en occuper lui-même.
Les capitaines Barton et Shepstone, avec le Natal Native Horse dirigé
par les lieutenants Raw et Roberts furent envoyés nettoyer le
plateau. Le piquet du Natal Native Corps leur fut adjoint en soutien,
ce dernier étant remplacé par la compagnie du cpt Cavaye
sur la pointe est de l’escarpement. Le reste des hommes n’eut
pas de consignes particulières si ce n’est déjeuner
au plus vite et de conserver leur équipement à portée
de mains. Les batteries d’artillerie restèrent harnachées
et les troupes montées ne devaient pas mettre pied à terre.
Dunford rejoignit Pulleine pour le déjeuner.
Alors
qu’ils se restauraient, un piquet de garde posté au sommet
d’Isandlwana fit savoir que les Zoulous se retiraient et que certains
étaient en mouvement en direction de l’est. On peut supposer
que cette force devait tourner vers le sud et prendre Chelmsford de
flanc. C’est cette possibilité qui apparemment qui fit
que Durnford se mit lui aussi en route vers l’est, en direction
du « conical Kop » avec 2 escadrons des Natal Native Horses,
la batterie de lance-fusées et une compagnie du Natal Native
Corps vers 11h30. Bien qu’il ait demandé le soutien de
2 compagnies d’infanterie, celles-ci ne vinrent pas. La sortie
de Durnford diminuait déjà le nombre d’hommes présents
dans le camp même et certains officiers protestèrent fortement
contre ce renfort. Un message fut cependant envoyé à Shepstone
pour qu’il s’engage dans un mouvement tournant.
Cavaye
étendit sa compagnie le long de la crête et envoya le lt
E. Dyson 500m plus loin sur la gauche. Les hommes de Raw traversèrent
le plateau en direction du nord-est pendant que ceux de Roberts avançaient
plein nord. Les hommes de Raw étaient répartis en groupes
et l’un d’eux se mit à poursuivre du bétail
mené par quelques Zoulous sur plusieurs km devant eux. En arrivant
au sommet d’une ligne de crête, ils tombèrent nez-à-nez
avec la quasi totalité de l’armée zouloue (qui avait
en fait prévu d’attaquer le lendemain, la pleine lune du
22 janvier étant considérée comme de mauvais augure).
L’assaut était cependant désormais inévitable.
Le « régiment » umCijo se mit alors en marche, suivi
par le uThulwana. Rapidement toute l’armée était
en marche en formation de combat mais sans les instructions que Mavugmengwana
et Tshingawayo tentaient vainement de leur communiquer. Les Zoulous
avaient 6km à faire pour atteindre le plateau, et il leur faudrait
une trentaine de minutes pour y arriver.
L’attaque zouloue typique est appelée « izimpondo
zankomo » ('Cornes du buffle), soit un double mouvement d’encerclement
figurant les cornes de l’animal. La corne droite se déplaça
le long de la vallée entre le plateau et les hauteurs avoisinantes,
repoussant les hommes de Raw et Roberts mais se trouvant prise de flanc
sous le feu de ceux de Cavaye. Le centre se mit en route vers la crête
du plateau pendant que la corne gauche se dirigeait vers la déclivité
qui menait au « conical Kop ».
Shepstone
partit au galop prévenir Cavaye puis Pulleine qui sonna l’alarme.
Il était environ midi. Cependant Pulleine ne parut pas saisir
tout de suite la gravité de la situation. Le flou des compte-rendus
ne lui permit pas de comprendre que c’est toute l’armée
zouloue qui venait de se mettre en marche contre le camp
La compagnie du cpt W.E. Mostyn fut envoyée en renfort près
de Cavaye, déjà rejoint par Raw et Roberts, ce qui brisa
davantage la cohésion des troupes. En face d’eux les régiments
uNokenke et uDududu se dirigeaient vers l’arrière d’Isandlwana
pendant que la résistance des hommes du Natal Native Corps s’effilochait.
La retraite fut sonnée et Pulleine envoya le cpt Younghusband
la couvrir. Les Natal Natives s’enfuirent en désordre vers
le camp mais le reste des troupes se regroupa au pied de l’escarpement
et infligea de sévères pertes au uNonenke quand il apparut
sur la crête. A cet instant la plus grande menace semblait provenir
du nord et c’est dans cette direction que les compagnies du cpt
G.V. Wardell et des lieutenants F.P. Porteus et C.D. Pope furent orientées.
Lorsque le uCimjo déboucha à son tour sur la crête,
il en subit le tir mortel.
Les
mouvements de Durnford dans la plaine sont peu clairs. Selon certains
compte-rendus il était à 6km du camp quand il obliqua
vers la gauche. Il n’avait pas trouvé l’ennemi qu’il
pensait croiser. Soudain le soldat Whitelaw lui apporta un message lui
signalant l’ennemi tout proche. Peu de temps après, celui-ci
était effectivement en vue et s’élançait
par milliers en direction du campement Se trouvant sous la menace d’être
coupé de ses arrières, Durnford entama une retraite parfaitement
exécutée.
Un
peu plus tôt la batterie de lance-fusées s’était
trouvée bloquée par le terrain et s’était
dirigée vers la gauche. Alors qu’elle approchait du pied
du mont Itusi, les Zoulous apparurent au sommet. Une seule fusée
(peut-être 2) fut tirée avant que la batterie ne soit débordée.
Tous les servants furent tués sauf 3. La compagnie du Natal Native
qui se trouvait alors derrière la batterie retraita vers le camp.
Pendant ce temps Durnford avait déployé ses hommes sur
les rives de la rivière coule vers le sud à l’ouest
du « conical kop » et s’apprêtait à affronter
les régiments inGobamakhosi et uMbonambi. Les hommes se comportèrent
fort bien et furent bientôt renforcés par une trentaine
d’hommes des Newcastle Mounted Rifles dirigés par le cpt
Bradstreet. Durnford et les hommes de Pope plus à l’ouest
avaient réussi à stopper l’avance de la «
corne gauche ».
A
mesure que de plus en plus de Zoulous, particulièrement le régiment
uVe, descendaient les collines, il semble que les Britanniques aient
réajusté leurs positions en un »L » grossier,
Younghusband à la base d’Isandlwana avec Mostyn et Cavaye
face au nord sur sa droite. Près des positions de Cavaye se trouvait
une petite montée à partir de laquelle une crête
rocheuse descend vers le sud-est. Porteus et Wardell se trouvaient à
cet endroit qui offrait un excellent champ de tir vers l’est.
Pope se trouvait au pied de cette crête. Les régiments
uNokenke et uDududu avaient contourné Isandlwana mais Shepstone
et une partie des hommes de Raw parvenaient plus ou moins à les
contenir.
A
cet instant la situation était plutôt à l’avantage
des Britanniques. Les canons avaient été mis en batterie
sur une petite hauteur et tiraient sans discontinuer sur les masses
de guerriers ennemis. Les salves de l’infanterie étaient
elles aussi particulièrement meurtrières sur des groupements
aussi compacts. Les Zoulous se trouvaient en moyenne à 200-300
mètres et ils se mirent à se jeter à terre et à
ramper pour progresser entre 2 salves de mousqueterie. La bataille continua
sous cette forme statique pendant quelques temps...
Mais
un soudain revirement de situation redonna l’avantage aux Zoulous.
La raison de ce revirement à longuement été débattue.
L’explication traditionnelle veut que les hommes n’aient
plus eu de munitions et que le Natal Native ait battu en retraite, ouvrant
la voie aux Zoulous qui purent ainsi encercler les différentes
compagnies.
Il est vrai que du côté de Durnford, les munitions commençaient
à manquer. Des cavaliers furent envoyés auprès
du 24th Foot pour en récupérer avec comme réponse
de « trouver les [leurs] », ce qu’ils ne parvinrent
pas à faire, celles-ci se trouvant quelque part entre Rorke’s
drift et Isandlwana. Il n’était désormais plus possible
de tenir la berge de la rivière et les hommes de Durnford battirent
en retraite. Le flanc droit britannique était désormais
totalement exposé et les hommes de Pope pris de flanc.
Une théorie plus moderne réfute le simple manque de munitions
et parle justement du flottement de la ligne britannique suite à
la retraite de Durnford. Les chefs de régiment Zoulous surent
saisir l’opportunité qui s’offraient à eux
et lancèrent leurs hommes à la charge. Il convient aussi
de noter que la ligne de front était trop lâche, plusieurs
mètres séparant les hommes entre eux.
On peut aussi signaler en ce qui concerne l’approvisionnement
en munitions que celles-ci étaient regroupées dans des
caisses en bois contenant 600 cartouches. Chaque caisse nécessitait
que 6 au moins des 18 vis qui la fermait soit retirées après
que le cerclage de fer qui les entourait été coupés.
Mais seuls quelques sergents-armuriers avaient à dispositions
les précieux outils nécessaires. Cependant certains témoignages
de survivants parlent aussi de munitions situées à l’autre
extrémité du campement soit entre 1000 et 1500m de ceux
qui en avaient le plus besoin. Lorsque l’alarme fut sonnée
les hommes se mirent en ligne avec en moyenne seulement 40-50 cartouches
au lieu des 70 réglementaires, les havresacs contenant les munitions
supplémentaires étant bien souvent restés dans
les tentes. De plus, certains spécialistes en armurerie ont aussi
découvert que le fusil en dotation standard avait tendance à
s’enrayer après plusieurs tirs par temps chaud. Certains
Natives possédaient aussi de vieux Enfield à chargement
par le canon au rythme de tir très faible.
On peut raisonnablement imaginer que l’exposition du flanc droit
britannique, la retraite du Natal Native et le flottement dans la cadence
de tir britannique après le tarissement des munitions immédiatement
disponibles ont tous contribué à ce fatal retournement
de situation.
Les
hommes du Natal Native partirent en tête vers Fugitive’s
drift (appelé ainsi après la bataille, bien sûr)
laissant la place libre au uCimjo qui fonça dans l’espace
ainsi libéré pour prendre les soldats à revers.
Ce mouvement, conjoint à l’avancée du régiment
uVe, balaya les hommes de Porteus. Wardell étendit davantage
sa ligne, pour la voir se faire enfoncer.. En moins de 20mn depuis la
fuite des Natives, la ligne de front s’était effondrée.
Les hommes reculèrent en désordre en direction des tentes
dans l’espoir de fuir par la piste de Rorke’s drift. Durnford
conservait l’espoir que Shepstone pût tenir à l’ouest
le col qui permettrait aux survivants de s’enfuir mais celui finit
par être débordé. Durnford rallia environ 70 hommes,
dont une partie de ceux de Pope face aux chariots regroupés.
Les régiments inGobamakhasi et uMbonambi se ruèrent sur
eux et en vinrent à jeter les corps de leurs propres morts sur
les baïonnettes pour percer ce « dernier carré ».
Un
autre groupe, mené par Pope, put se rallier sur l’arrière
gauche des tentes, mais fut rapidement massacré. Quelques survivants
se regroupèrent à l’ouest du col séparant
Isandlwana du « Black’s koppie », éminence
rocheuse située au sud, mais sans espoir. Les hommes de Younghusband
quant à eux se repositionnèrent au sud d’Isandlwana
même, où ils résistèrent jusqu’à
la fin, baïonnette au canon.
Le
campement n’était plus qu’une zone de grande confusion.
Les Zoulous, selon leurs traditions, éventraient les corps des
morts, s’habillaient avec les uniformes des cadavres et pillaient
sans retenue. Certains mourront d’avoir bu des produits médicaux
en dehors de toute prescription ( !)
Les chiffres de pertes sont :
- Britanniques : 858, Indigènes : 471 (soit 1329). Six compagnies
complètes du 24th Foot (Warwickshire’s) ont été
tout simplement annihilées. 84 officiers ont été
tués.
- Zoulous : Entre 2 et 3000. Pertes ultérieures dûes aux
blessures mal soignées inconnues, estimées parfois au
double.
8.
Fugitive’s drift
Bien
que les chefs Zoulous n’aient pu faire grand chose pour coordonner
l’attaque, les régiments Undi et uDloko avaient été
maintenus en réserve. Sous le commandement de Dabulamanzi il
leur fut ordonné de se dirigé vers l’extrémité
ouest du plateau, d’aller derrière Isandlwana et de couper
la retraite vers Rorke’s drift. Ces 2 régiments coupèrent
effectivement la piste mais ne prirent pas part à la bataille
proprement dite.
Le
gros du Natal Native avait fui relativement tôt, vers 12h45-13h00,
mais à ce moment le Undi avait déjà barré
la piste menant à Rorke’s drift et ils durent donc prendre
un chemin plus direct vers la rivière Buffalo, passant au pied
du « Black’s koppie ». Dabulamanzi s’en aperçut
et envoya une partie de ses hommes pour les prendre de flanc. Bien que
plusieurs Natives se soient débarrassés de leurs armes,
uniformes et insignes dans l’espoir d’être épargnés,
la plupart d’entre eux furent découverts et tués.
Quelques-uns parvinrent cependant à s’enfuir.
Pour
le reste des fuyards à cheval- car pour les hommes à pied
il n’existait à peu près aucune chance de s’en
sortir- le chemin ne fut pas moins difficile, à commencer par
un torrent où abondaient les rochers, difficile à traverser
pour les chevaux et trempant les fusils. Ceux qui ne purent le franchir
furent tués. Le prochain obstacle se révéla être
un autre torrent encaissé 4m plus bas qui ne pouvait être
franchi que près de sa jonction avec la Manzimyama. dont la berge
rocheuse était très pentue et dont le fond était
fortement rocailleux. Ce n’était en fait qu’une espèce
de gorge où de nombreux soldats furent tués en tentant
de la traverser. Les hommes eurent quelque répit en grimpant
la pente de la crête Impete mais à partir de là,
la descente vers la rivière Buffalo est nettement plus raide.
Les fugitifs se regroupèrent sur un plat côté Zululand.
A cette époque de l’année la Buffalo est en crue
et sa traversée des plus dangereuses. En partie protégés
par les tirs des Natives qui étaient passés au Natal avant
eux les soldats entreprirent la traversée. Plusieurs périrent
noyés ou écrasés sur les rochers en tentant de
rejoindre l’autre rive. De là ils furent poursuivis sur
3 à 4km par quelques centaines de Zoulous ayant trouvé
un gué un peu plus haut.
Le nombre de Natives ayant survécu est inconnu. Quant aux Britanniques,
seuls 74 parvinrent à sortir vivants de cette équipée(1).
Le
lieutenant Melvill du 1/24th Foot reçut l’ordre de Pulleine
de sauver les couleurs du régiment(2). Ce faisant il croisa la
route du lieutenant Coghill qui s’était blessé au
genou lors de l’attaque du repaire de Sihayo et pouvait à
peine marcher mais avait réussi à trouver un cheval sur
le champ de bataille. Coghill parvint à traverser la Buffalo
mais le cheval de Melvill glissa sur un rocher, emportant son cavalier
dans les flots tumultueux.
Coghill
tenta de venir à sa rescousse mais sa monture fut abattue par
des tirs provenant de la rive opposée. Le lieutenant Higginson
vint au secours des 2 hommes. Tous parvinrent à rejoindre la
rive côté Natal. Higginson s’enfuit mais Melvill,
toujours à cheval, refusa d’abandonner Coghill désormais
à pied. Les Zoulous qui avaient traversé la rivière
finirent par tuer les 2 hommes. Il est certain que Melvill, s’il
avait abandonné son compagnon, eût pu s’en sortir
sain et sauf. Les couleurs régimentaires, perdues lors de la
traversée, furent découvertes sur la berge le 1er février.
En
fin d’après-midi le drame était consommé.
Quelques rares survivants tentèrent la traversée de la
Buffalo dont les berges de chaque côté étaient couvertes
de cadavres.
A Isandlwana les Zoulous avaient emporté à peu près
tout ce qu’ils pouvaient. Certains régiments étaient
alors partis en direction de Rorke’s drift (3).
9.
Retour de Chelmsford sur le champ de bataille
Après
sa rencontre avec Lonsdale, Chelmsford se remit en route en direction
du camp. Les cavaliers furent envoyés en reconnaissance et revinrent
en expliquat que le camp grouillait de Zoulous. Les hommes de Glyn,
épuisés après une longue journée de marche,
arrivèrent vers 18h00. Les troupes se mirent en positions, canons
au centre, près du « conical kop ». Seules les silhouettes
des chariots abandonnés et de quelques Zoulous repassant la ligne
de crête étaient encore visibles. Quatre obus furent tirés
en direction du camp sans réponse. Le major Black mena alors
3 compagnies du 24th en direction du « koppie » qui porte
aujourd’hui son nom.
Chelmsford
avait toujours du mal à imaginer que tout le camp ait pu être
balayé et s’accrochait à l’espoir que le gros
des forces avait certainement dû s’enfuir et se retrancher
à Rorke’s drift.
La
troupe en son entier se mit en marche et atteint le col séparant
Isandlwana du « Black’s koppie » vers 21h00. Il était
alors impossible de monter un campement digne de ce nom et les hommes
se contentèrent de dormir à même le sol, au milieu
des cadavres de leurs camarades. Au loin, ils pouvaient voir la lueur
de flammes et entendre des échanges de coups de feu vers l‘ouest.
Cela ne pouvait signifier qu’une chose : Rorke’s drift était
attaquée. Chelmsford s’inquiéta alors de la possibilité
d’une invasion du Natal laissé sans protection particulière.
Avant l’aube les hommes se remirent en route. Chelmsford ne souhaitait
pas que ses hommes, dont le moral était alors au plus bas, puissent
voir le site en pleine lumière. Alors qu’ils approchaient
de la Batshe une partie des Zoulous qui venaient d’attaquer Rorke’s
drif, probablement 3000, débouchèrent d’une vallée
sur leur gauche à 400m à peine. Mais rien ne se passa.
Les Zoulous étaient probablement encore plus épuisés
que les hommes Chelmsford et ces derniers n’avaient plus assez
de munitions pour se lancer dans un nouvel assaut. Ainsi les 2 armées
se contentèrent donc de se croiser de loin, chacune guettant
les mouvements de l’autre.
Le
champ de bataille ne fut pas revisité avant le 17 mai. La section
des Dragoon Guards passa 4 jours, du 21 au 24 (soit 4 mois après)
à enterrer les corps. Les vautours, corbeaux, hyènes et
chacals avaient alors largement eu le temps de se repaître des
victimes dont la plupart n’étaient plus identifiables.
Dans de nombreux cas les uniformes avaient été pris par
les Zoulous, rendant de fait l’identification encore plus difficile.
A
cause du manque de temps et de la dureté du sol, aucune tombe
ne fut creusée. Les corps furent rassemblés et des pierres
entassées dessus. Au lieu de l’habituel champ de croix,
Isandlwana devint alors parsemée de cairns.
10.
Conséquences
La
défaite britannique stupéfia le monde entier. Il était
alors tout simplement inimaginable qu’une armée européenne
à l’armement moderne puisse être vaincue, et pire
encore annihilée, par de simples indigènes armés
de sagaies. Jusqu’à l’annonce de cette nouvelle la
guerre contre les Zoulous n’était considérée
que comme l’un de ces petits « feux de brousse » coloniaux
comme il en apparaissait constamment aux 4 coins de l’empire.
Isandlwana modifia radicalement l’attitude britannique.
En
définitive Isandlwana se révéla être une
victoire à la Pyrrhus pour les Zoulous. Non seulement à
cause des effroyables pertes subies mais aussi, comme l’avait
craint Cetshwayo, de rallier les anti-guerre londoniens à la
cause des pro-guerre du Natal et de leur allouer toutes les ressources
nécessaires.
L’engagement britannique eut 3 causes principales :
- Une forme de chauvinisme dû à l’orgueil blessé
d’avoir été vaincus par des indigènes considérés
comme des inférieurs. L’honneur national demandait réparation
et cette victoire tactique de l’ennemi devait se conclure par
sa défaite totale.
- Des considérations domestiques. L’affaire aurait sans
aucun doute une influence considérable lors des prochaines élections
parlementaires.
- Il était de plus impensable de laisser s’installer un
tel précédent. La Grande-Bretagne pire ne pouvait laisser
s’imaginer qu’elle n’était pas capable de protéger
et défendre son empire.
L’armée
fut renforcée et réinvestit le Zoulouland où elle
battit l’ennemi à plusieurs reprises. La dernière
de ces batailles est celle d’Ulundi qui mena à la capture
de Cetshwayo. Les Britanniques poussèrent les vassaux de ce dernier
à ne plus le reconnaître comme leur roi. Lorsque celui-ci
put retourner dans son pays l’empire zoulou n’existait plus.
(1)
Une autre source parle de 55 survivants Britanniques.
(2) La possibilité que Melvill ait utilisé ce prétexte
pour s’enfuir est aussi évoquée.
(3) La bataille de Rorke’s drift fera l’objet d’un
article séparé.
Sir Theophilus
Shepstone
Cetshwayo
Sources
:
The invasion of Zululand @ http://mysite.wanadoo-members.co.uk/historyfile/zulu_invasion.htm
Anglo-Zulu war @ http://en.wikipedia.org/wiki/Zulu_War
Military History Journal - Vol 4 No 4 The Anglo-Zulu War of 1879-Isandlwana
and Rorke's Drift @ http://rapidttp.com/milhist/vol044gc.html
Battle of Isandlwana @ http://en.wikipedia.org/wiki/Battle_of_Isandlwana
The battle of Isandlwana @ http://www.britishbattles.com/zulu-war/isandlwana.htm