Israël intervient
au Sud-Liban, 1978
L'opération
Litani
Les attaques de
l'OLP contre Israël à partir du Liban, en 1977 et 1978,
provoquent une escalade dans l'affrontement entre les deux parties.
Le 11 mars 1978, 11 membres du Fatah débarquent sur une plage
au nord d'Israël et s'emparent de deux bus pleins de passagers
roulant sur l'axe Tel-Aviv-Haïfa, tirant ensuite sur les véhicules
environnants. Ils abattent ainsi 37 Israëliens et en blessent 76
avant d'être eux-mêmes tués par les forces israëliennes.
Israël envahit le Liban quatre jours plus tard : c'est l'opération
Litani. Israël occupe la plus grande partie du Liban située
au sud de la rivière Litani, provoquant le déplacement
d'au moins 100 000 Libanais et la mort de 2 000 personnes. Le Conseil
de Sécurité des Nations Unies adopte la résolution
425 qui décrète un retrait immédiat d'Israël
de la zone envahie, créant aussi l'UN Interim Force in Lebanon
(UNIFIL), chargée de maintenir la paix sur place.
La zone de sécurité
Israël retire
finalement ses troupes fin 1978, mais garde le contrôle du sud
en installant une zone de sécurité, large de 30 à
40 km, près de la frontière. Pour tenir ces positions,
Israël installe une Armée Sud-Libanaise, une milice composée
à la fois de chiites et de chrétiens placée sous
le commandement du major Saad Haddad. Israël l'approvisionne en
armes et en ressources, et envoie des "conseillers" pour la
renforcer et la prendre en main. La ligne dure du Premier Ministre israëlien
de l'époque, le membre du Likoud Menachem Begin, compare la situation
critique de la minorité chrétienne au Sud-Liban (5 % de
la population sur le territoire de l'Armée Sud-Libanaise) à
celle des Juifs européens pendant la Seconde guerre mondiale...
Des échanges
de tirs violents ont lieu entre l'OLP, l'Armée Sud-Libanaise
et Israël, l'OLP attaquant les positions de l'armée à
la solde de l'Etat hébreu et tirant des roquettes sur le nord
d'Israël, celle-ci répliquant par des frappes aériennes
sur les positions de l'OLP, tandis que l'Armée Sud-Libanaise
(ou Armée du Liban du Sud, ALS) tente de consolider sa mainmise
sur la région frontalière.
Conflits entre
la Syrie et la Phalange
La Syrie, dans
le même temps, se trouve confrontée à la Phalange,
milice chrétienne conduite par Bashir Gemayel, dont les actions
de plus en plus agressives -comme la tentative, en avril 1981, de s'emparer
de la cité stratégique de Zahle, au centre du Liban- montrent
que celle-ci ne veut pas permettre à la Syrie, comme elle l'entend,
de balayer Gemayel et de placer à la tête de l'Etat libanais
Suleiman Frangieh comme président. En conséquence, la
Phalange renforce ses liens avec Israël. En avril 1981, en l'occurence,
pendant les combats à Zahle, Gemayel demande l'appui de Tsahal.
Le Premier Ministre israëlien acquiesce et envoie immédiatement
des jets sur place, qui abattent deux hélicoptères syriens.
Cela incite le président syrien al-Assad à installer des
batteries de missiles sol-air sur les hauteurs environnantes de Zahle.
Les plans israëliens
pour l'attaque
En août,
le Premier Ministre Menachem Begin est réélu et le mois
suivant, lui et son ministre de la Défense Ariel Sharon commence
à bâtir un plan pour une seconde invasion du Liban destinée,
cette fois, à extirper l'OLP du pays. Sharon vise à "détruire
l'infrastructure militaire de l'OLP, et si possible éliminer
sa direction, ce qui signifie pénétrer dans les quartiers
ouest de Beyrouth, où se trouve le QG de l'OLP et ses bunkers
de commandement" .
Sharon attend
de Gemayel, une fois celui-ci installé en tant que président,
qu'il signe un traité de paix avec Israël, garantissant
ainsi sa frontière nord. Begin présente le plan de Sharon
devant la Knesset en décembre 1981 ; pourtant, après que
des voix nombreuses se soient élevées contre son application,
Begin est obligé de faire machine arrière. Mais Sharon
continue à mettre la pression pour qu'il soit bien réalisé.
En janvier 1982, Sharon rencontre Gemayel sur un navire israëlien
au large des côtés libanaises et discute avec lui d'un
plan devant mener les forces israëliennes "aussi loin au nord
qu'au bout de l'aéroport international de Beyrouth" . En
février, avec l'aval de Begin, Yehoshua Seguy, le chef des services
de renseignement militaires, est envoyé à Washington pour
discuter du problème libanais avec le secrétaire d'Etat
Alexander Haig. Pendant la rencontre, Haigf affirme "qu'il ne peut
pas y avoir d'assaut massif sur le Liban sans provocation majeure de
sa part" .
La situation entre
Israël et l'OLP
Mais jusqu'alors,
aucune provocation importante n'est venue du Liban. En fait, durant
toute la période du cessez-le-feu, d'août 1981 à
mai 1982, il n'y a eu qu'une seule attaque de roquettes de l'OLP contre
Israël, en mai justement. C'était simplement une réponse
à un bombardement israëlien des positions de l'OLP au Liban,
le 9 mai, lui-même représaille d'une attaque à la
bombe des Palestiniens contre un bus de Jérusalem. Cet échange
particulier met en relief un problème crucial à propos
du cessez-le-feu, dans la perspective israëlienne : il s'applique
seulement à la frontière avec le Liban, ce qui signifie
que les attaques de l'OLP à partir de la Jordanie ou de la Cisjordanie
peuvent continuer en toute impunité, alors qu'une réponse
israëlienne dirigée contre le Liban serait une violation
délibérée du cessez-le-feu.
Arafat, pour sa
part, refuse de condamner les attaques partant d'autres territoires
que le Liban, se basant sur le fait que le cessez-le-feu concerne uniquement
ce dernier théâtre d'opérations. L'interprétation
d'Arafat sous-estime le fait que l'accord de cessez-le-feu ne diminue
en rien, en fait, l'escalade de la violence entre l'OLP et Israël
dans les autres territoires, Liban excepté. Israël continue
ainsi à éroder l'OLP dans les attaques pendant le cessez-le-feu.
Le 21 avril, par exemple, des appareils israëliens attaquent des
objectifs côtiers au Sud-Liban.
La troisième phase de la guerre 1982-1983
L'invasion israëlienne
du Liban
L'assassinat d'Argov
Le 3 juin 1982,
l'organisation d'Abu Nidal essaye de mettre fin aux jours de l'ambassadeur
israëlien au Royaume-Uni, Shlomo Argov. Abu Nidal a déjà
à son actif la mort de nombreux diplomates de l'OLP, et il a
même essayé de supprimer Yasser Arafat et Mahmud Abbas,
étant de fait condamné à mort par l'organisation
palestinienne. De plus, les services de renseignement britanniques affirment
qu'Abu Nidal a été appuyé par l'Irak, ce que confirme
leurs homologues israëliens. Pourtant, cela ne dissuade pas Ariel
Sharon et Menachem Begin d'ordonner une frappe aérienne de représailles
sur des cibles de l'OLP et du FPLP dans les quartiers ouest de Beyrouth,
attaques qui font plus de 100 morts, en violation totale du cessez-le-feu.
L'OLP réplique
par de nombreux tirs d'artillerie et de roquettes sur Israël à
partir de ses positions au Liban, violant là aussi clairement
le cessez-le-feu. Israël déclare que c'est là la
principale cause qui la pousse ensuite à l'invasion. Dans le
même temps, le 5 juin, le Conseil de Sécurité des
Nations Unies vote une résolution (UNSCR 529) appelant "toutes
les parties à cesser immédiatement et simultanément
toute activité militaire à l'intérieur des frontières
du Liban et sur la frontière israëlo-libanaise, avec comme
délai 6h00 le dimanche 6 juin 1982 au plus tard" .
Le 6 juin 1982
: Israël entre au Liban
Israël lance
l'opération Paix en Galilée le 6 juin 1982, attaquant
les bases de l'OLP au Liban. Les forces de Tsahal s'enfoncent bientôt
à plus de 40 km à l'intérieur du pays, se déplaçant
vers l'est de Beyrouth avec le soutien tacite des leaders et des milices
maronites. Quand le cabinet israëlien convient d'approuver l'invasion,
Ariel Sharon la présente comme une percée de 40 km au
Liban, destinée à démolir les points forts de l'OLP,
et à créér ensuite une zone de sécurité
élargie pour mettre Israël à l'abri des tirs de roquettes.
En fait, le chef d'état-major de Tsahal, Raphaël Eitan,
et Sharon, ont déjà ordonné aux troupes de marcher
tout droit sur Beyrouth, en accord avec le plan du ministre de la Défense
établi dès septembre 1981. Le lendemain, le Conseil de
Sécurité des Nations Unies passe une autre résolution
"demandant à ce qu'Israël retire immédiatement
et de manière inconditionnelle ses forces des frontières
internationales reconnues du Liban". Les Etats-Unis n'ont pas opposé
leur veto. Le 8 juin par contre, ils en font usage contre une résolution
qui réitère la précédente, donnant ainsi
un soutien implicite à l'invasion israëlienne.
Voici une vidéo
extraite d'un documentaire montrant les appareils israëliens, F-15
Eagle et F-16 Falcon livrés par les Etats-Unis, en opération
au Liban pendant Paix en Galilée. Les appareils de Tsahal s'assurent
facilement la maîtrise du ciel, non seulement à cause de
la supériorité de leurs appareils, mais aussi en raison
de la qualité des pilotes, résultat d'un entraînement
étonnamment dur et sélectif. Les MiG-21 Fishbed et MiG-23
Flogger livrés par l'Union Soviétique aux Syriens ne purent
jamais faire face à l'aviation israëlienne, et même
l'artillerie antiaérienne basée sur des canons et des
missiles SAM (Surface to Air Missile) ne put empêcher le déferlement
des appareils de la Hey Hal'Avir. Les Israëliens avaient bien retenu
la leçon de la guerre du Kippour, en 1973. VOIR
Le siège de Beyrouth
Le 15 juin, les
Israëliens sont déjà retranchés aux abords
de la capitale libanaise. Les Etats-Unis demandent à l'OLP de
quitter séance tenante le Liban, tandis que Sharon ordonne le
bombardement à outrance des quartiers ouest, afin de neutraliser
le maximum possible des 16 000 combattants palestiniens qui se sont
réfugiés dans ces positions fortifiées. Dans le
même temps, Arafat essaye de négocier, pour sauver politiquement,
ce qui est clairement un désastre pour l'OLP, une tentative finalement
couronnée de succès lorsqu'une force multinationale arrive
sur place pour évacuer l'organisation palestinienne.
Les combats dans
Beyrouth font au total près de 6 700 morts, dont 80 % de civils,
avec 1 100 membres de l'OLP et 88 des IDF (Israël Defence Forces).
De violents échanges d'artillerie entre Tsahal et l'OLP, ainsi
que le pilonnage par cette dernière des quartiers chrétiens
de l'est de Beyrouth, entraîne une riposte aérienne israëlienne
de plus en plus importante à partir du 21 juillet. On admet communément
que durant la campagne, près de 20 000 personnes dans les deux
camps ont été tuées, et près de 30 000 blessées.
Négociations
pour un cessez-le-feu
Le 26 juin, le
Conseil de Sécurité des Nations Unies propose une nouvelle
résolution prévoyant un retrait simultané des deux
parties en présence du Liban. Les Etats-Unis mettent leur veto
car ils ne veulent pas que l'OLP demeure une organisation politique
présente sur place. Ils soutiennent ainsi clairement la politique
de Sharon, qui vise à annihiler l'OLP avant toute négociation
concernant un retrait du Liban.
Finalement, la
violence reprenant de plus belle et les pertes civils augmentant dangereusement,
Philip Habib est envoyé sur place pour rétablir l'ordre,
ce qui est accompli le 12 août juste après un pilonnage
long et intense des quartiers ouest de Beyrouth sur ordre d'Ariel Sharon,
qui dure toute une journée. La trêve négociée
par Habib prévoit un retrait simultané de Tshal et de
l'OLP, tandis qu'une force internationale composée de Marines
américains, de troupes françaises et italiennes protégera
l'évacuation des Palestiniens mais aussi les civils sans défense.
L'intervention
Internationale
Une force multinationale
débarque à Beyrouth le 20 août 1982 pour superviser
le retrait de l'OLP du Liban, tandis que la médiation américaine
permet d'obtenir le retrait des troupes syriennes et de l'OLP de la
capitale libanaise.
Pourtant, Israël
affirme que plus de 2 000 combattants de l'OLP se cachent dans les camps
de réfugiés situés dans la périphérie
de Beyrouth. En accord avec cette assertion, Bashir Gemayel, qui a été
élu président du Liban sous contrôle militaire israëlien
le 23 août, envoie des éléments de sa milice, la
Phalange, à l'intérieur des camps le 12 septembre. Mais,
le 14 septembre, Gemayel est assassiné. Beaucoup y voient l'oeuvre
de la Syrie, agissant en sous-main par le biais d'une des organisations
qu'elle contrôle au Liban.
Les massacres
de Sabra et Shatila
Après en
avoir discuté avec des leaders de la Phalange, Sharon et Eitan
décide sans en parler au cabinet israëlien d'envoyer Tsahal
dans les quartiers ouest de Beyrouth, violant l'accord établi
avec Habib ; ces forces transportent quelques 200 phalangistes au sein
des camps, où ces derniers entrent à 6h00, le 16 septembre.
Les phalangistes restent sur place jusqu'au matin du 19 septembre, et
massacrent, selon les estimations israëliennes, de 700 à
3 000 Palestiniens, "aucun n'étant membre d'une quelconque
unité de l'OLP" .
La commission
Kahan, envoyée par le gouvernement israëlien pour enquêter
sur les circonstances du massacre, tient Sharon et Eitan indirectement
responsables, ces derniers sachant très bien ce qui allait se
passer en envoyant 200 membres d'une milice anti-palestinienne dans
les camps de réfugiés. La commission suggère que
le premier démissionne de son poste de ministre de la Défense,
ce qu'il fait, même s'il reste un membre influent du gouvernement
en demeurant ministre sans portefeuille.
Les massacres
font la une du monde entier, et des appels de plus en plus nombreux
pressent la communauté internationale d'assumer la responsabilité
de stabiliser le Liban. En conséquence, la force multinationale
qui commençait à quitter le pays après l'évacuation
de l'OLP revient sur place. Avec le soutien américain, Amir Gemayel
est choisi par le parlement libanais pour succéder à son
frère comme président et se concentre à nouveau
sur le retrait des forces israëliennes et syriennes.
L'accord du 17
mai
Le 17 mai 1983,
Amir Gemayel, Israël et les Etats-Unis signent un accord dans lequel
le retrait israëlien est fonction du redéploiement des troupes
syriennes vers leur territoire ; en fait, les deux nations ont exercées
de fortes pressions sur Gemayel. Le document énonce que "l'état
de guerre entre Israël et le Liban est désormais terminé
et n'a plus d'existence officielle". En fait, cet accord s'assimile
à un traité de paix avec Israël, et il est vu par
de nombreux musulmans libanais comme un accord tacite à destination
des Israëliens afin que ceux-ci puissent conserver une emprise
au Sud-Liban. L'accord du 17 mai est présenté dans le
monde arabe comme une reddition imposée sous la contrainte, et
Amir Gemayel est comparé au président norvégien
Quisling, une marionette au service des nazis pendant la Seconde guerre
mondiale, après que ceux-ci eurent envahi et conquis la Norvège
entre avril et juin 1940 (opération Weserübung). Les tensions
au Liban en sont ravivées. La Syrie refuse cet accord et ne veut
en aucune manière discuter d'un retrait de troupes, en profitant
même pour consolider ses positions au Liban.
En août
1983, Israël se retire du district du Chouf (au sud-est de Beyrouth),
oblitérant ainsi la zone tampon existante entre les milices chrétiennes
et druzes, délenchant une nouvelle phase de violents combats
sur place. En septembre, les Druzes ont repris le contrôle de
presque tout le Chouf ; Israël s'est retirée de presque
tout le Liban, exception faite de la zone de sécurité
au sud. Les forces israëliennes resteront dans ce secteur, en violation
de la résolution 425 des Nations Unies, jusqu'en 2000.
Regain de violence
L'effondrement
virtuel de l'armée libanaise, en février 1984, corolllaire
de la défection de nombreuses unités druzes et musulmanes
en direction des milices, est un coup sévère pour le gouvernement.
Avec les Marines américains prêts au départ, les
Syriens et les milices musulmanes accentuent leur pression sur l'équipe
au pouvoir. Le 5 mars, le gouvernement libanais annule l'accord du 17
mai 1983, et les Marines quittent le pays quelques semaines plus tard.
Cette période
de chaos est marquée par les premières attaques contre
les intérêts américains ou occidentaux de manière
plus large, telle l'attaque suicide du 18 avril 1983 contre l'ambassade
des Etats-Unis, située dans les quartiers ouest de Beyrouth,
qui tue 63 personnes. A la suite de cet attentat, la Maison Blanche
ordonne le bombardement navale des positions druzes, dont il résulte
beaucoup de morts, la plupart étant non-combattants. La réplique
aux bombardements américains consiste en des attaques suicides.
Le 23 octobre 1983, l'une d'entre elles perpétrée à
Beyrouth sur le quartier général des forces franco-américaines
cause la mort de 241 Américains et de 58 Français.
Le 18 janvier 1984, le président de l'université américaine
de Beyrouth, Malcom Kerr, est abattu. Après le retrait des troupes
américains en février, les attaques continuent, notamment
une qui vise l'annexe de l'ambassade américaine dans l'est de
Beyrouth le 20 septembre 1984, tuant 9 personnes dont 2 soldats américains.
A cette époque,
le Hezbollah commence à émerger au sein d'une nébuleuse
de groupes chiites combattant l'occupation israëlienne, fractionné
du principal mouvement chiite, celui du mouvement Amal de Nabih Berri.
Le groupe trouve son inspiration dans le mouvement islamiste révolutionnaire
qui s'est illustré de manière éclatante en Iran,
en 1979, et gagne très tôt le soutien de près de
1 500 combattants iraniens des Gardes, les Pasdaran. Avec l'appui iranien,
et un large vivier de réfugiés chiites désoeuvrés
dans lequel il peut puiser à volonté, le Hezbollah devient
vite une force combattante de premier plan.
La quatrième phase de la guerre 1984-1989
L'escalade du
conflit, la crise politique
Entre 1985 et
1989, les violences sectaires empirant étant donné que
tous les efforts variés de réconcilation nationale échouent.
Des combats farouches ont lieu pendant ce que l'on a appelé la
Guerre des Camps, en 1985-1986, où une coalition de milices armées
par la Syrie et menée par le mouvement Amal tente de chasser
l'OLP de ses points-forts au Liban. Des milliers de Palestiniens sont
tués dans ces affrontements, tandis que les camps de réfugiés
de Sabra, Shatila et Bourj-al-Barajneh sont annihilés.
Des combats de
grande ampleurs reprennent à Beyrouth en 1987, lorsque les Palestiniens,
les mouvements progressistes et les Druzes s'allient contre le mouvement
Amal, provoquant finalement l'intervention de la Syrie.
En 1988, une bataille acharnée fait encore rage dans la capitale
libanaise, cette fois-ci entre Amal et le Hezbollah.
Ce dernier parvient à reprendre le contrôle de plusieurs
quartiers de la capitale tenus par l'autre mouvement chiite, apparaissant
pour la première fois comme une force avec laquelle il faut désormais
compter dans la capitale libanaise.
Le gouvernement
Aoun
Dans le même
temps, le Premier Ministre Rashid Karami, pivot d'un gouvernement d'union
nationale après les efforts de paix avortés de 1984, est
assassiné le 1er juin 1987. Le mandat du président Gemayel
expire quant à lui en septembre 1988. Avant de se retirer, celui-ci
désigne un autre chrétien maronite, le commandant des
Forces armées libanaises, le général Michel Aoun,
en tant que Premier Ministre, contrevenant ainsi au Pacte National.
Le conflit, à ce moment, est aussi fortement perturbé
par l'engagement de plus en plus marqué de l'Irak, Saddam Hussein
cherchant à étendre sur d'autres champs de bataille la
guerre Iran-Irak. Pour contrer le soutien de l'Iran à Amal et
au Hezbollah, l'Irak appuie les milices chrétiennes : Saddam
Hussein soutient Aoun entre 1988 et 1990.
Les groupes musulmans
rejettent la violation du Pacte National et donnent leur soutien à
Selim-al-Hoss, un sunnite qui a succédé à Karami.
Le Liban est ainsi fracturé entre un gouvernement chrétien
militaire dans les quartiers est de Beyrouth, et un gouvernement musulman
dans les quartiers ouest sans président.
L'accord de Taif
L'accord de Taif
en 1989 marque le début de la fin des hostilités. En janvier
de cette même année, un comité appointé par
la Ligue Arabe, dirigé par le Koweït et comprenant l'Arabie
Saoudite, l'Algérie et le Maroc, commence à formuler des
solutions pour le conflit. Cela mène à une rencontre des
parlementaires libanais à Taif, en Arabie Saoudite, où
ceux-ci se mettent d'accord sur un accord de réconciliation nationale
pour octobre. L'accord offre un large rôle à la Syrie dans
les affaires libanaises. Retournant au Liban, les parlementaires ratifient
l'accord le 4 novembre et élisent René Mouawad comme président
le jour suivant. Le leader militaire Michel Aoun refuse d'accepter la
nomination de Mouawad, et dénonce l'accord de Taif.
Mouawad est assassiné
16 jours plus tard dans un attentat à la voiture piégée
à Beyrouth, le 22 novembre, lorsque son cortège revient
des cérémonies du jour de l'indépendance libanaise.
Elias Hrawi lui succède et reste en place jusqu'en 1998. Aoun
refuse encore ce nouveau président, et dissout le parlement.
Conflits internes
dans Beyrouth-Est
Le 16 janvier
1990, le général Aoun ordonne à tous les médias
libanais de cesser d'utiliser les termes "Président"
ou "Ministre" pour qualifier Hrawi ou les participants de
l'accord de Taif. Les Forces Libanaises, qui sont devenues un véritable
contrepouvoir dans les quartiers chrétiens de la capitale, protestent
en suspendant toutes leurs émissions. Aoun fait disparaître
d'autres journaux qui refusent de plier. La tension avec les Forces
Libanaises s'intensifie, car Aoun craint plus que tout qu'elles ne cherchent
à lier partie avec le gouvernement Hrawi.
Au début
1990, les forces d'Aoun s'opposent aux Forces Libanaises, après
que le général ait déclaré qu'il était
d'intérêt national pour le gouvernement "d'unifier
les armes", autrement dit de soumettre toutes les milices chrétiennes
à sa botte. De violents combats se déroulent alors dans
les quartiers est de Beyrouth, mais si les Forces Libanaises prennent
initialement l'avantage, cette guérilla intestine sape leur potentiel
de combat, ce qui les amènent à requérir l'aide
de la Syrie.
En août
1990, le Parlement libanais, qui n'a pas obéi à l'ordre
de dissolution lancé par Aoun, et le nouveau président
se mettent d'accord sur des amendements constitutionnels incorporant
des réformes politiques proposées à Taif. L'Assemblée
Nationale comprend désormais 128 sièges et pour la première
fois, un nombre égal de postes est prévu à la fois
pour les chrétiens et les musulmans.
La "guerre
de libération" d'Aoun
En mars 1990,
après avoir soumis les Forces Libanaises, Aoun lance ce qu'il
appelle une "guerre de libération" contre la Syrie
et ses alliés des milices libanaises. En conséquence,
les Syriens intensifient leur pression sur l'armée libanaise
et sur la poche tenue par sa milice dans Beyrouth-Est, tandis que Saddam,
focalisé sur le Koweit, a tendance à restreindre les livraisons
d'armes et de vivres. Pourtant, Aoun persiste dans ses vues, dénonce
le régime du président syrien al-Assad et affirme qu'il
mène un combat pour l'indépendance du Liban. Bien qu'il
réussisse à rallier une large partie de la population
chrétienne à son opinion, il n'est vu par les musulmans
que comme un leader sectaire, tel qu'il en existe beaucoup d'autres
alors au Liban, et ils ne font pas confiance à son programme
politique. Il est aussi handicapé par le problème de légitimité
posé par la concurrence du gouvernement Hrawi, soutenu par la
Syrie, dans les quartiers ouest de Beyrouth.
En octobre 1990,
la Syrie lance une opération de grand style contre les positions
d'Aoun autour du palais présidentiel, impliquant des forces au
sol, l'aviation, et les alliés libanais : des centaines de partisans
d'Aoun sont massacrés. L'armée syrienne nettoie ensuite
les dernières poches de résistance, renforçant
sa mainmise sur la capitale. Aoun trouve refuge à l'ambassade
française de Beyrouth, puis s'envole à Paris. Il ne revient
dans la capitale libanaise que tout récemment, en mai 2005.
Certains historiens
affirment que cette vaste opération lancée par la Syrie
n'a pu se faire sans un accord préalable avec les Etats-Unis
(William Harris, par exemple), prévoyant une acceptation tacite
de l'offensive en échange d'un soutien contre Saddam Hussein
pendant la guerre du Golfe, qui intervient au même moment. Cela
aurait permis d'empêcher les Israëliens de barrer la route
à l'aviation syrienne qui appuyait les troupes au sol pendant
ces combats. En 1989, Aoun affirmait que les Etats-Unis avaient vendu
le Liban à la Syrie.
Fin de la guerre civile
En mars 1991,
le Parlement vote une loi d'amnistie qui efface tous les crimes politiques
commis avant son instauration. Cette amnestie ne concerne pas les crimes
commis à l'encontre de diplomates étrangers et d'autres
qui sont renvoyés devant le Conseil Supérieur de Justice.
En mai 1991, toutes les milices sont progressivement dissoutes (à
l'exception notable du Hezbollah) et les Forces Armées Libanaises
commencent une lente recontruction, cette fois-ci en tant que principale
institution libanaise non-sectaire.
Pourtant les violences
refont parfois surface. A la fin décembre 1991, une voiture piégée
contenant sans doute près de 110 kg d'explosifs explose dans
le voisinage de la ville musulmane de Basta. Au moins 30 personnes sont
tuées, 120 blessées, dont l'ancien Premier Ministre Shafik
Wazzan, qui roulait dans une voiture à l'épreuve des balles.
Conclusion
Depuis la fin
de la guerre, les Libanais ont conduit plusieurs élections, la
plupart des milices se sont débandées ou se sont affaiblies,
et les Forces Armées Libanaises ont étendu l'autorité
du gouvernement central sur les deux tiers du pays. Seul le Hezbollah
a refusé le désarmement, légitimant ce fait par
le combat contre l'occupation israëlienne dans le secteur des fermes
de Shebaa.
Le Liban supporte
toujours les profondes meurtrissures de la guerre civile. Au total,
on estime que plus de 100 000 personnes ont trouvé la mort, le
même nombre étant sans doute blessées. Environ 900
000 personnes, soit 20 % de la population d'avant-guerre, ont été
déplacées. Peut-être 250 000 ont émigré
de manière définitive. Des milliers de mines restent enfouies
dans les zones précédemment disputées. Quelques
otages occidentaux enlevés au milieu des années 80 (la
plupart attribués au Hezbollah, bien que le mouvement le nie
catégoriquement) sont retenus jusqu'en mai 1992. Les victimes
libanaises des enlèvements de l'époque de la guerre, "disparue"
purement et simplement, se comptent en dizaines de milliers.
Les attentats
à la voiture piégée deviennent un moyen d'action
commode et répandu dans les groupes usant de la violence à
travers le monde, ayant fait ses preuves durant le conflit.
En 15 ans de guerre, on a comptabilisé au moins 3 641 attentats
à la voiture piégée, qui ont fait 4 386 morts et
des milliers de blessés.
Le pays a fait
des progrès dans la reconstruction de ses institutions politiques
et dans la reconquête de son indépendance, depuis la fin
de la guerre, donnant aux Musulmans une plus grande place dans le processus
politique. Les critiques, pourtant, soulignent que ces nouveaux arrangement
institutionnalisent les divisions sectaires dans le gouvernement.
Sources :
http://en.wikipedia.org/wiki/Lebanese_civil_war(photos et liens correspondants).
http://en.wikipedia.org/wiki/1982_Invasion_of_Lebanon
http://www.liberty05.com/civilwar/civil.html(pour les photos).
http://www.ina.fr/voir_revoir/israel-palestine/index.fr.html(vidéos
de l'INA).
RAZOUX (Pierre), Tsahal : nouvelle histoire de l'armée israëlienne,
Paris, Perrin, 2006
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